Résumé : Nadjette est déçue. Elle ne s'attendait pas du tout à la réaction de Khadoudj et veut abandonner ses projets pour rentrer en ville. Athmane tente de lui faire entendre raison. Ils sont à l'écurie. Athmane embrasse la main de son amie. La vieille Khadoudj qui passait par là les surprend sans qu'ils ne se rendent compte. Elle ouvre la bouche toute grande sans qu'aucun son n'en sorte. Puis comme mue par une force intérieure, elle battit en retraite et part à la recherche de son mari. El-Hadj Mokhtar était comme à ses habitudes, en chaque début d'après-midi, assis sous un olivier, son chapelet à la main. Elle s'approche de lui et se laisse tomber à ses côtés, le souffle court : - Oh Mokhtar ! Nous avons abrité le péché sous notre toit ! Oh Mokhtar ! Satan s'est introduit chez nous. La baraka va s'envoler de notre maison. Mokhtar arrête d'égrener son chapelet et remarque la rougeur de ses joues et son excitation : -Que racontes-tu, femme ? Pourquoi t'affoles-tu ainsi ? La vieille Khadoudj se prend la tête entre les mains. - Si tu avais vu, Mokhtar. Si tu avais vu ce que j'ai vu ! - Mais enfin, raconte. Qu'as-tu bien pu voir Khadoudj qui te bouleverse à ce point ? - Nadjette. Cette vaurienne a ensorcelé notre fils. Si tu les avais vus dans l'écurie. Euh. Si tu avais vu comment elle se conduisait avec Athmane. Comme toutes les paysannes de son époque, la vieille Khadoudj était trop pudique pour relater à son mari intégralement la scène à laquelle elle venait d'assister. Mais le vieux Mokhtar n'était pas dupe. Il avait saisi le fond de cette agitation somme toute féminine, qui s'est emparée de sa femme. Il pousse un soupir, maudit Satan et se remet à égrener les perles de son chapelet. - Laisse ces jeunes tranquilles, femme. - Comment ?! Tu veux que je les laisse tranquille ?! Tu veux que je vois le péché se commettre sous mon toit et que je me taise ? - Mais non, femme. Tu n'as pas saisi le fond de ma pensée. Je veux tout simplement que tu évites de crier au scandale. Il ne faut surtout pas que Athmane ou cette fille sachent que tu les a surpris ensemble dans l'écurie. - Hein ? Mais mon pauvre Mokhtar, tu as perdu l'esprit ou quoi ? Cette fille va attirer la malédiction sur nous. Je ne veux pas qu'elle reste une minute de plus dans ma maison. Elle s'interrompt et porte la main à sa bouche : - Mais qu'est-ce que j'attends donc pour aller le lui dire ouvertement. Le vieux Mokhtar retint sa femme qui s'apprêtait à se lever : - Ecoute Khadoudj. De ma vie je n'ai eu à renvoyer quelqu'un de chez moi. Que ce soit les amis ou les ennemis. J'ai toujours su prendre les décisions formelles au moment opportun sans avoir à déclencher le scandale. Laisse-moi tout d'abord discuter avec Athmane. Cette fille ne va quand même pas élire domicile chez nous, elle n'est là que pour quelques jours. (À suivre) Y. H.