Le 35e Congrès franco-maghrébin de psychiatrie, organisé les 13 et 14 octobre à Oran, s'est voulu, avant tout, une rencontre d'échanges pour mieux faire le point sur l'état de la psychiatrie dans un contexte d'aggravation des maux sociaux. Trois associations ont conjugué leurs efforts pour la tenue de ce colloque : la Société algérienne de psychiatrie (SAP), l'Association algérienne des psychiatres d'exercice privés (AAEPP) et l'Association des psychiatres de l'Oranie (APO). L'objectif assigné à cette rencontre scientifique se confine en l'échange avec leurs confrères français mais surtout maghrébins. "Nous sommes de même culture, avec presque un même niveau de développement, et il est important de pouvoir échanger sur nos problèmes communs comme les addictions à la drogue, les dépressions et autres stress induits par l'évolution des sociétés, tels que l'urbanisation, les traumatismes et aussi le radicalisme. Faut-il libéraliser ou continuer à interdire la drogue ? Nous devons discuter de ce type de problème", expliquera F. Kacha, le président de la SAP. Pour ce dernier, l'état de la psychiatrie en Algérie est étroitement lié au bilan qui reste à faire en matière de politique de santé concernant cette spécialité et à l'organisation de la prise en charge des malades notamment en dehors des structures hospitalières. Cela d'autant que les psychiatres affirment qu'ils ne peuvent "enfermer indéfiniment les malades dans les hôpitaux". Intervenant autour de "l'apport de la psychiatrie aux maladies neuro-dégénératives", il a expliqué qu'il y a une soixantaine de structures créées à l'échelle nationale, dont des centres intermédiaires de la prise en charge des addictions. "Seulement, a-t-il précisé, il n'y a pas eu de plan et d'organisation pour accompagner ces structures. Du coup, certaines sont utilisées à d'autres fins et certaines ne fonctionnent pas comme il se doit." La prise en charge des personnes souffrant d'addiction est urgente, au moment où l'Algérie "est inondée par le cannabis ; il y a de la cocaïne et du subutex aussi", a relevé Farid Bouchène, président de l'AAPEP. Pour ce qui est de l'internement des malades, là encore, les psychiatres dénoncent le manque d'organisation et de politique d'accompagnement des structures intermédiaires qui "ne font que des consultations alors que les malades ont besoin de prise en charge spécifique en dehors de l'hôpital". Quant aux troubles du comportement et les maux liés à l'anxiété (angoisse et dépression), les psychiatres estiment que cela n'est pas du ressort de la psychiatrie uniquement, mais de l'ensemble de la société, car ce sont des questions sociales qui nécessitent un consensus social. Les psychiatres, qui disent ignorer les contours de la nouvelle loi sanitaire, préconisent la sectorisation, pour répondre au manque de planification et d'organisation dans la prise en charge des malades. D. LOUKIL