Des personnes arrêtées après le putsch manqué en juillet en Turquie ont été "torturées ou maltraitées", a affirmé hier l'ONG Human Rights Watch (HRW), estimant que l'état d'urgence en vigueur donne "carte blanche" aux policiers pour commettre des abus. "Les décrets adoptés dans le cadre de l'état d'urgence ont eu un impact négatif sur les conditions de garde à vue dans les locaux de la police et sur les droits des détenus", s'alarme HRW dans un rapport de 47 pages. Privation de sommeil, passages à tabac et menaces de viol figurent parmi les mauvais traitements documentés par HRW, qui affirme avoir mené des entretiens avec plus de 40 personnes, dont des avocats, des spécialistes de la médecine légale et d'anciens détenus. Un homme, Eyüp Birinci, a affirmé au procureur de la République d'Antalya (Sud) que des policiers l'avaient "frappé sur la plante des pieds, sur le ventre et menacé de le castrer", selon HRW qui reproduit son témoignage. L'ONG fait état d'un "climat généralisé de peur" depuis la tentative de coup d'Etat militaire qui a secoué la Turquie dans la nuit du 15 au 16 juillet. Déclaré pour trois mois après le putsch manqué, l'état d'urgence a été prolongé de 90 jours supplémentaires le 19 octobre. L'état d'urgence permet notamment d'allonger la durée légale de la garde à vue à 30 jours. Pour Hugh Williamson, directeur de la division Europe et Asie centrale à HRW, "en supprimant les garanties contre la torture, le gouvernement turc a en fait donné carte blanche aux organismes chargés de l'application des lois pour torturer et maltraiter des détenus de manière discrétionnaire". L'ONG Amnesty International avait affirmé en juillet avoir réuni des "preuves crédibles" attestant de tortures, et même de viols, de personnes détenues en Turquie après la tentative de coup d'Etat. Aucun commentaire officiel sur le rapport de HRW n'a pu être obtenu dans l'immédiat, mais un responsable turc avait "qualifié d'absurdes les affirmations d'Amnesty et catégoriquement nié toute torture". Plus de 35 000 personnes ont été arrêtées dans le cadre de l'enquête sur la tentative de putsch, a indiqué samedi le ministre de la Justice Bekir Bozdag. R. I./Agences