L'Algérie pâtit d'une expansion des dépenses publiques très importante. La pro-cyclicité des dépenses a prévalu au détriment des règles, peut-on lire dans le document portant sur le "Nouveau modèle de croissance économique et trajectoire budgétaire 2016-2019". Il y est expliqué que la pression sociale et la volonté de l'Etat de bâtir rapidement un large réseau d'infrastructures économiques et sociales ont conduit à une forte pro-cyclicité des dépenses publiques. Il y est également souligné que l'accroissement des revenus fiscaux pétroliers s'est généralement accompagné d'une expansion de la dépense budgétaire avec comme corollaire, une augmentation du déficit budgétaire. Cette trajectoire budgétaire, l'Etat veut aujourd'hui la réajuster dans le cadre du "Nouveau modèle de croissance économique", en y mettant de la rigueur. L'ajustement budgétaire est basé sur, entre autres, un prix du baril à 50 dollars en 2017, 55 dollars en 2018 et 60 dollars en 2019 et sur un taux de change de 108 dinars pour un dollar. Ne s'agit-il pas là de projections risquées ? Souhil Meddah est expert en finance. Il estime qu'il est difficile d'établir des prévisions sur la base de facteurs exogènes. Il ajoute toutefois qu'il y a des indicateurs qui montrent que le marché pétrolier va probablement se stabiliser dans les prochaines années. Une hypothèse plausible, d'autant plus que le niveau mondial des investissements dans le secteur des hydrocarbures a baissé et que la demande pétrolière mondiale est en train de se reprendre. Meddah rappelle que le taux de change dollar/dinar varie en fonction du prix du baril. En cas de stabilité des cours du brut autour de 55 et 60 dollars, avec un dollar moins erratique, et un taux de la FED moins élevé, il n'y aura pas de risque sur la parité du dinar. Et puis, dit-il, le pays peut toujours modifier les choses dans les lois de finances. L'hypothèse de la parité peut ainsi changer à tout moment. Par ailleurs, la relance keynésienne enregistrée, ces dernières années, ne risque-t-elle pas de marquer le pas sous l'effet de la contraction de la dépense publique, conséquemment au réajustement budgétaire, dans le cadre de ce nouveau modèle de croissance ? L'approche économique keynésienne observée depuis quelques années, s'était toujours basée sur un impératif simple, celui de la dépense publique, selon les termes de Souhil Meddah. Celle-ci a toujours constitué le principal moteur de la croissance, un instrument de distribution directe et indirecte des revenus (salaires, sous-traitance, rémunération des PME et TPE ...). Et, le "Nouveau modèle" en projet, compte, d'après lui, diversifier ces mécanismes, en adoptant d'autres dispositifs dont pourrait faire partie la commande privée, par exemple. Cette nouvelle vision, note-t-il, appelle à des modalités à la fois programmatiques mais libérales pour atteindre cet objectif. L'économie nationale ne passera pas du tout au tout. Mais, ajoute l'expert, on va assister à une période de transition où l'Etat investisseur va remplir la fonction de régulation. Le basculement risque cependant de ne pas se faire en douceur... Souhil Meddah estime que le passage vers le nouveau modèle économique, avec une trajectoire budgétaire soutenable, nécessite tout un ensemble de mesures dont la finalité est de suppléer les impératifs immédiats (budget de l'Etat, déficit, etc.), mais aussi, d'anticiper sur certains préalables. Et, cela commande d'aller vers des dispositions à court terme, sans perdre de vue, la feuille de route 2017-2019. Et à juste titre, formule-t-il, et dans la diversification des ressources de financement, nous pouvons évoquer la limitation de la dépense publique qui devrait laisser place à d'autres formes de financements internes telles que les partenariats public-privé (PPP, etc.), et des apports participatifs cessibles dans le cadre des apports externes comme le Build, Operate and Transfer (BOT, etc.). Y. S.