"Vos propos n'ont rien à voir avec l'ordre du jour. Aujourd'hui, nous sommes ici pour travailler et parler d'un sujet bien précis. Donc, arrêtez de perturber les travaux de la plénière", a asséné sèchement Ould Khelifa. Fait peu ordinaire à l'hémicycle : le chef du groupe parlementaire du Front de libération nationale (FLN), Mohamed Djemaï, et le président de l'Assemblée populaire nationale (APN), Larbi Ould Khelifa, issu du même parti, ont eu un échange de mots pour le moins spectaculaire. Une passe d'armes qui cache mal une crise profonde au sein du vieux parti, à la veille des élections législatives. Tout a commencé lorsque le chef du groupe parlementaire s'est levé pour demander un "point d'ordre", au milieu de la séance consacrée au débat sur le projet de loi relatif à l'organisation, à la sécurité et à la police de la circulation routière, après sa présentation par le ministre des Transports et des Travaux publics, Boudjema Talaï. "Nous sommes tous avec le président Abdelaziz Bouteflika", s'est écrié M. Djemaï en plénière, interrompant subitement le débat. Ce qui a soulevé l'ire du président de l'APN qui le priera de respecter la séance. "Vos propos n'ont rien à voir avec l'ordre du jour. Aujourd'hui, nous sommes ici pour travailler et parler d'un sujet bien précis. Donc, arrêtez de perturber les travaux de la plénière", l'a tancé sèchement Larbi Ould Khelifa. Réagissant promptement, Djemaï invite les députés du parti, du moins ceux qui lui sont acquis, à quitter l'hémicycle, pour laisser place à un autre poids lourd du FLN, en l'occurrence Tliba Baha-Eddine, afin d'intervenir au débat. Selon des indiscrétions, le courant ne passe pas également entre Djemaï et Tliba. Quant à son différend avec Ould Khelifa, il serait, à la base, lié, apprend-on de sources proches du parti, à un rapport que le président de l'APN aurait adressé récemment à Bouteflika et dans lequel, il reprochait "l'indiscipline" de Djemaï et de son clan. Néanmoins, affirment d'autres sources, également proches du parti, la goutte qui a fait déborder le vase serait liée au refus d'Ould Khelifa d'être accompagné, à l'occasion de sa toute prochaine visite en Chine, du député Nacer Latrèche, malgré sa qualité de président du comité d'amitié algéro-chinois. Selon les mêmes sources, pour justifier son refus, Ould Khelifa aurait mis en avant l'argument que ce député, et non moins mouhafedh de Batna, roulerait pour Ali Benflis. Une accusation que confirme indirectement Mohamed Djemaï. "Ils veulent ressusciter l'épisode de 2004", a-t-il, en effet, soutenu juste après sa sortie de l'hémicycle, allusion au conflit de l'époque entre les deux clans de Bouteflika et de Benflis. Rencontré dans son bureau, Mohamed Djemaï, encore très en colère, s'en est pris à des "parvenus parrainés par des chapelles étrangères au parti", qu'il accuse de vouloir semer la zizanie dans les rangs du FLN. "Nous avons eu écho de rumeurs faisant état de la volonté de certains députés imposés au parti de casser les militants crédibles. Et en tant que chef de groupe parlementaire et militant, j'ai le devoir de réagir pour mettre fin à ces agissements", a-t-il expliqué. Qui sont les élus du FLN ciblés ? S'il refuse de citer des noms, M. Djemaï accuse certains de "ces parvenus" d'avoir été des militants y compris de l'ancien FIS dissous. "Parmi eux, il y en a un qui fut même P/APC du FIS en 1991", a-t-il dénoncé. Le président de l'APN Ould Khelifa est revenu à la charge en fin de séance en accusant Mohamed Djemaï de vouloir faire du "chantage" en demandant aux députés de déserter l'hémicycle. "Qu'il cesse de jouer le pharaon !" s'est emporté Ould Khelifa. Farid Abdeladim