Mettant à profit la détermination de ses pairs arabes à saisir cette chance de coller à l'évolution que connaît le monde, sous peine de disparaître, le président de la République veut réussir un véritable coup d'éclat à Alger. Le 17e Sommet ordinaire de la Ligue arabe offre l'opportunité à Abdelaziz Bouteflika de briller sur la scène internationale. Outre une représentation arabe au plus haut niveau pour la majeure partie des pays membres de l'organisation, le chef de l'Etat veut donner un cachet particulier à ce rendez-vous à travers la présence annoncée d'un certain nombre de personnalités occidentales. Ainsi, en plus du secrétaire général des Nations unies, le Premier ministre espagnol, Jose Luis Rodriguez Zapatero, fait partie des invités de marque. La présence d'un responsable européen de ce niveau constitue une première pour ce genre de rendez-vous. Le fait qu'il représente l'Espagne, dont la relation civilisationnelle avec le monde arabe est historique, confère un attrait exceptionnel à sa participation à ce sommet, au cours duquel il prononcera un discours à l'ouverture des travaux. Les présidents du Nigeria et du Brésil ont répondu favorablement à l'invitation algérienne, à l'instar des premiers responsables de la commission de l'Union africaine et de l'Organisation de la conférence islamique (OCI). Devant l'impossibilité d'être présents en raison de la tenue le même jour, soit le 22 mars, du Conseil européen, les Italiens et les Allemands délèguent leur chef d'Etat, qui exerce un pouvoir beaucoup plus honorifique. De nombreux chefs de la diplomatie occidentale sont également attendus dans la capitale algérienne, dont Michel Barnier, le ministre français des Affaires étrangères. On annonce même la présence de la secrétaire d'Etat américaine, Condoleeza Rice, non encore confirmée. Au-delà de cette représentation extra-arabe relevée, Bouteflika compte faire de ce sommet la rampe de lancement du “renouveau arabe” à travers l'adoption de la série de réformes, qui marqueront inévitablement l'histoire de cette partie du monde, restée en marge de l'évolution du monde. Dans sa dernière déclaration à l'occasion du 60e anniversaire de la Ligue arabe, le président a émis “l'espoir d'un retour de l'enthousiasme arabe pour galvaniser les énergies en faveur de la libération de la Palestine et de la création d'un Etat palestinien avec Jérusalem comme capitale, ainsi que la libération de l'Irak par le départ des troupes étrangères d'occupation”. C'est un signe qui ne trompe pas sur son ambition de rendre à l'Algérie le leadership arabe, après s'être éclipsée de cette scène pendant plus d'une décennie à cause de la violence islamiste qui a ravagé le pays. D'ailleurs, Abdelaziz Bouteflika ne cache pas son jeu en affirmant : “Le prochain Sommet arabe sera une occasion pour renouveler les ambitions de la nation arabe, car des millions de citoyens arabes attendent ce renouveau.” Pour atteindre cet objectif, tous les sujets qui fâchent seront tus. Ainsi, le conflit du Sahara occidental et la question d'un secrétariat général tournant de la Ligue arabe sont évacués de l'ordre du jour dans le but d'éviter toute levée de boucliers. Il n'est également pas question de faire de reproches aux hôtes pour leur manque de soutien à l'Algérie durant la période difficile qu'elle a traversée pendant les années de terrorisme. Ainsi, Alger pardonne tout dans l'espoir de revenir sous les feux de la rampe. Dans le but d'y parvenir, un “sommet exceptionnel” (dixit Belkhadem) est envisagé. Il est hors de question d'accepter un quelconque report des réformes tant attendues. Le ministre algérien des Affaires étrangères a fait le forcing lors des travaux préliminaires des experts et des chefs de la diplomatie pour que le sommet soit une réussite totale. K. A.