Le président de la Haute instance indépendante de surveillance des élections (Hiise), Abdelwahab Derbal, a animé, hier, au siège du Conseil de la nation, une conférence-débat sur "les besoins de transparence et la culture électorale". Tout au long de cette première sortie médiatique depuis l'installation de l'instance, le 22 janvier dernier, M. Derbal a tenté de convaincre du caractère indépendant de cette instance et sa détermination à crédibiliser les prochains rendez-vous électoraux. Sauf que la transparence n'est pas vraiment manifeste dans sa stratégie de communication. M. Derbal n'a pas souhaité révéler le budget alloué à l'instance qu'il préside dont le mandat est de cinq ans. Il n'a pas non plus divulgué les salaires de ses 410 membres, tous nommés par décret présidentiel, comme il n'a pas voulu s'exprimer sur le vote des corps constitués ou l'éventuelle candidature du ministre de l'Intérieur aux élections législatives. Pourtant l'organisation des élections dépend largement de la compétence de l'administration, en particulier le ministère de l'Intérieur, ce qui offre certes l'avantage de réduire les coûts organisationnels et de compter sur des fonctionnaires expérimentés mais qui, néanmoins, suscite des suspicions justifiées. Abdelwahab Derbal n'a pas non plus répondu à la question se rapportant à l'immixtion de l'argent sale dans la campagne électorale, ni sur le fait que les membres de l'instance ne soient pas tenus de prêter serment. Concernant le risque de l'utilisation de moyens de l'Etat par certains ministres-candidats durant la campagne électorale, M. Derbal a déclaré qu'"un haut responsable candidat n'est pas au-dessus de la loi qui interdit ces pratiques. Si j'ai des preuves, je vais appliquer les sanctions réglementaires". S'agissant de la supposée candidature du ministre de la Justice, il réplique : "Pourquoi parler de lui spécialement ? La loi n'interdit pas aux ministres de se présenter aux élections." Réagissant à une question d'arithmétique soulevée pour dire que les 410 membres de l'Instance ne suffisent pas pour surveiller 50 000 bureaux de vote, Abdelwahab Derbal estime que les prérogatives de la structure qu'il préside "sont plus larges et plus importantes que l'observation et le contrôle des bureaux de vote", mais admet que l'assainissement du fichier électoral est pour le moment impossible, du fait, notamment, que dans certaines régions du pays, les citoyens ne sont pas prompts à déclarer les décès aux services de l'état civil. Dans le fond, comme dans la forme, de nombreux arguments développés par Abdelwahab Derbal pour prouver le caractère indépendant de cette instance plaident pour le contraire. Constatons : son président et la moitié de ses membres sont désignés par le président de la République, le reste est choisi par le président du Conseil national économique et social. L'instance ne compte donc aucun représentant de partis politiques ou de candidats au scrutin. M. Derbal met en avant le statut de la Haute instance qui lui confère l'autonomie de gestion et l'autonomie financière et la dote de crédits particuliers pour la surveillance des opérations électorales. Ces crédits sont directement gérés par son président, qui jouit de la qualité d'ordonnateur principal. La Haute instance indépendante de surveillance des élections est opérationnelle depuis mercredi dernier. Ses membres occupent provisoirement les locaux du Palais des nations, en attendant l'attribution d'un siège, après les élections législatives. Nissa Hammadi