Cela fait 22 années que nous a quittés, à jamais, Nabila Djahnine, l'engagée sans frontières. Tellement elle était de toutes les causes justes. Jusqu'à la fin, elle résistera y compris devant ses assassins qui l'attendaient au tournant d'une rue à Tizi Ouzou où elle s'était installée après des études d'architecture. Ses assassins avaient voulu, par leur geste, tuer, à travers elle, la présidente de Tighri n tmetut (Cri ou écho des femmes), la vie, la résistance et l'engagement politique. Mais elle demeure dans les mémoires un symbole de la résistance d'où les hommages qu'elle continue à recevoir à chaque anniversaire de son assassinat. Son nom est étroitement lié à la résistance des femmes algériennes à l'instar de la jeune lycéenne, Katia Bengana, qui avait refusé de porter le voile. Son évocation est aussi un devoir de mémoire pour que nul n'oublie le sacrifice des Algériens et des Algériennes qui ont dit non à l'obscurantisme, à l'injustice et oui à une Algérie sociale et démocratique. Retour sur une vie écourtée par la bêtise humaine. Nabila Djahnine a été assassinée le 15 février 1995 ; elle n'avait que 30 ans. Mais son engagement était pluriel. Quand elle quitte Béjaïa après avoir décroché son baccalauréat, elle était quelqu'un de très actif : elle avait baigné dans un monde d'échanges et de culture : le théâtre amateur, le cinéma, la poésie, la littérature, etc. Avec ses amis, ses frères et sœurs, elle était initiée à la politique. Elle était déjà militante au Groupement communiste révolutionnaire (GCR), qui s'est mué en Parti socialiste des travailleurs (PST). Aussi, c'est naturellement qu'elle sera membre actif du Comité des cités universitaires de l'université de Tizi Ouzou, en marge de ses études en architecture ; elle a participé à la fondation du Syndicat national des étudiants algériens, comme elle a contribué, dans les années 1980, à la préparation et au déroulement des deuxièmes assises du Mouvement culturel berbère, "pour la reconnaissance par le pouvoir politique de la langue et de la culture berbères". Son engagement était véritablement pluriel. Et bien qu'elle ne soit pas du tout sectaire — elle était au-dessus de tout —, elle était touchée par la condition de la femme algérienne, reléguée au second plan notamment par le code de la famille. Elle sera alors cofondatrice de l'Association pour l'émancipation de la femme, et en 1990, de l'association Tighri n'tmetut (Cri ou écho de femmes), dont elle était présidente, avant de tomber sous les balles de ses assassins. Elle sera même, vers la fin des années 1980, membre de la direction du Parti socialiste des travailleurs (PST) et de la commission femmes de ce dernier. Sa sœur, Habiba, réalisatrice, lui a rendu hommage à travers un film documentaire, Lettre à ma sœur, visionné dans plusieurs pays. M. Ouyougoute