Résumé : Mus le peintre parle de son art et tente de démontrer que s'il était un adepte de l'impressionnisme, il était aussi influencé par son maître qui affectionnait la nature morte et les femmes, comme van Gogh et Renoir. Je sentais mon cœur faire un bond dans ma poitrine. Je gardais de Tahar une bonne impression, et durant les trois dernières années, j'ai tenté de retrouver sa trace en visitant toutes les galeries d'art susceptibles d'abriter ses œuvres. -Excusez-moi, je ne voulais pas vous offusquer, mais il se trouve que je connais Tahar. -Ah ! -Oui, nous nous sommes déjà rencontrés lors d'une manifestation culturelle. Le jeune artiste fronce les sourcils. -Vous êtes artiste, vous aussi ? Il se donne une tape sur le front. -Mais bien sûr que vous l'êtes, vous connaissez van Gogh et Renoir. -Et Victor Hugo, Zola, Colette, William Shakespeare, etc. Il brandit la main. -Attendez... Là vous me semez. Vous parlez de littérature alors que je parle de peinture. -La littérature est aussi un art. -Je n'en disconviens pas, mais où est la relation entre ces écrivains que vous venez de citer et mon enseignant ? Je prends un air sérieux et toussote avant de lui répondre : -Aussi loquace que vous êtes, vous ne m'avez pas permis de vous en dire plus. Il met un doigt sur sa bouche. - Allez-y donc. Je ne prononcerai plus un mot. J'humecte mes lèvres avant de lancer : -Je suis poète. Je veux dire que j'aime bien aligner la rime. Ces derniers temps, j'ai un peu remplacé mes vers par des récits. Néanmoins, il y a quelques années, j'ai tenté de me frayer un chemin à travers l'expression poétique. Il m'est arrivé de participer, de ce fait, à des expositions de peintures pour illustrer, par mes vers, certaines œuvres. Cela donnait un air plutôt romantique. Je m'arrête pour jeter un coup d'œil au jeune homme qui me faisait face, et qui avait plutôt l'air de croire à tout ce que je débitais. Voyant qu'il ne se moquait pas de moi, je poursuis : -C'est lors d'une de ces manifestations que j'ai rencontré Tahar. J'avoue que c'est quelqu'un qui ne m'a pas laissée indifférente. Ses points de vue sont d'une sagesse extrême, et il a une manière de voir les choses qui... Comme je ne trouvais pas mes mots, Mustapha vint à mon secours. -Qui changent de tout ce qu'on a vu ou entendu jusque-là. -C'est exact. Vous le pensez, vous aussi ? -Je ne le pense pas, je le crois. Tahar était un enseignant hors pair. Je regarde autour de moi. Le spacieux hall du théâtre abritait des dizaines d'œuvres et des dizaines de signatures. Quelques artistes s'étaient regroupés pour discuter entre eux, gobelet de café et cigarette à la main. Je tente de reconnaître Tahar... -Il n'est pas ici. (À suivre) Y. H.