La Cnag a installé 39 bureaux de wilaya et 7 à l'étranger. Elle tente de fédérer autour de sa mission des personnalités nationales comme Aït Ahmed, Abdelhamid Mehri et Mouloud Hamrouche. La Commission nationale de l'amnistie générale (Cnag) entend peser lourdement dans la mise en œuvre du projet portant amnistie générale, initié par le premier magistrat du pays, Abdelaziz Bouteflika. Selon son président, M. Ismaïl Abderrazek, également secrétaire général du Parti du renouveau algérien ou PRA, rencontré avant-hier au siège de la structure, la Cnag est en contact avec des personnalités nationales “qui ont leur poids sur la scène publique” pour les fédérer autour des objectifs de la commission. “Nous avons réussi à compter parmi nous l'ancien président Ahmed Ben Bella, dont la présidence d'honneur de la commission lui est échue. Notre ambition est d'inciter Aït Ahmed, dont la stature révolutionnaire nous intéresse, à nous rejoindre. Nous avons également entrepris des contacts avec Abdelhamid Mehri, Mouloud Hamrouche et Mohamed Salah Yahiaoui.” Notre interlocuteur reconnaît qu'aucun écho favorable ne lui est encore parvenu de la part de ces personnalités. Il n'en démord pas pour autant. De son avis, les noms cités ont montré, dans le passé, leur adhésion à des démarches fondées sur la réconciliation nationale comme solution à la crise sécuritaire. “Il suffit de les convaincre de s'impliquer ouvertement dans l'entreprise à faire aboutir le projet relatif à l'amnistie générale”, soutient-il optimiste. En attendant, la Cnag s'organise doucement et sûrement. Le 9 décembre dernier, le bureau de l'organisation a déposé un dossier d'agrément auprès de la direction compétente du ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales. “Nous avons reçu immédiatement un accord verbal”, a affirmé M. Ismaïl. En vertu de la loi organique sur les associations, la Cnag est agréée de fait dès lors que le délai de deux mois nécessaire à la notification d'un éventuel refus d'agrément par les services du département dirigé par Noureddine Yazid Zerhouni a expiré. “La Cnag cessera d'exister dès le jour de la tenue d'un référendum sur l'amnistie générale”, précise son président. Quant à ses missions, elles semblent moins claires. “Il revient à l'Etat de définir les aspects politiques et juridiques du projet. Notre rôle est de sensibiliser la population sur la pertinence de la démarche.” Pour l'heure, les animateurs de la Cnag s'attellent à établir un constat exhaustif de la situation sociale de ce qu'ils appellent “les victimes de la tragédie nationale”. Environ 5 000 dossiers, majoritairement ceux de repentis de l'AIS (Armée islamique du salut), sont en instance de traitement par la commission. “Nous avons reçu vingt lettres d'“émirs” de groupes terroristes (particulièrement ceux ayant bénéficié des dispositions de la loi portant rétablissement de la concorde civile, ndlr). Les problèmes qu'ils ont posés sont centrés globalement sur l'indemnisation et la réintégration des repentis à leurs postes de travail”, indique Abderrazek Ismaïl, ajoutant que “les walis sont entièrement aptes à prendre en charge ces préoccupations”. Les membres du bureau de la commission nationale de l'amnistie générale promettent, néanmoins, d'élaborer un rapport détaillé sur la réalité du terrain de l'après-terrorisme qu'ils remettront au président de la République. Dans ce document, seront également consignées les exigences des éléments armés demeurés au maquis. “Des terroristes, qui nous ont contactés, disent être disposés à déposer les armes si l'Etat leur donne des garanties. Nous n'avons pas les prérogatives qui nous permettent de négocier avec eux. Mais nous transmettrons leurs requêtes aux autorités”, promet notre hôte. En prévision de la seconde étape de sa mission, qui consistera à battre campagne pour l'amnistie générale, la Cnag compte s'implanter dans les 48 wilayas et dans les 1 541 communes. D'ores et déjà 39 structures de wilaya sont opérationnelles. 7 bureaux ont été ouverts dans les pays où la concentration des ressortissants algériens est avérée (trois antennes en France, une aux Etats-Unis, une en Syrie, une en Tunisie et une autre au Maroc). En cinq mois d'existence, la Cnag a déjà dépensé, à en croire son porte-parole, plus de dix millions de dinars (un milliard de centimes). “Nos besoins, à moyen terme, sont estimés à deux milliards de dinars. Nous avons compté jusqu'alors sur les dons de particuliers, mais nous ne refuserons pas une aide financière de l'Etat si elle nous est proposée”, confie M. A. IsmaIl. Eu égard à l'importance de la tâche confiée à la commission, il devient évident que toutes ses charges seront assumées sur le budget de l'Etat. Sinon comment expliquer la promptitude de la direction du PRA et de quelques anonymes à s'embarquer dans une aventure qui exige de grands moyens financiers et surtout d'immenses capacités de mobilisation. Ils réagissent : Mouloud Hamrouche : “Je n'ai pas été contacté” L'ancien Chef du gouvernement, joint hier par téléphone, nous a assurés qu'il n'a pas été approché, jusqu'alors, par les animateurs de la Commission nationale de l'amnistie générale (Cnag). “Je ne suis en contact avec personne sur cette question (amnistie générale, ndlr). Je n'ai absolument aucune idée sur ce que font les membres de la commission dont vous parlez.” Mouloud Hamrouche a refusé, néanmoins, de se prononcer sur l'éventualité d'adhérer à la démarche du chef de l'Etat si la demande lui est exprimée clairement et officiellement. Karim Tabbou (FFS) : “Nous n'adhérons pas à un projet dont nous ignorons le contenu” Le secrétaire national du FFS chargé de l'information a également affirmé que Aït Ahmed n'a pas été contacté par les responsables de la Cnag. Il a précisé que le FFS et son président ne sauraient “prendre position sur un projet dont ils ignorent le contenu”. Plus clairement, notre interlocuteur a rappelé que le premier parti de l'opposition dans l'histoire de l'Algérie indépendante ne conçoit pas la réconciliation nationale ou l'amnistie générale sans deux préalables : la justice et la vérité sur ce qui s'est passé durant les années du terrorisme. S. H.