La commune de Boudjima (Tizi Ouzou) a abrité, du 20 au 22 avril, le 4e Salon du livre. Inscrite sous le slogan «À Boudjima, je lis et je m'enrichis", cette édition a été marquée par des ventes-dédicaces, des ateliers pour enfants, des rencontres et tables rondes fort enrichissantes. Nelson Mandela a dit un jour : "L'éducation est l'arme la plus puissante qu'on puisse utiliser pour changer le monde", et l'APC de Boudjima, (wilaya de Tizi Ouzou), ainsi que les organisateurs l'ont bien compris et en ont fait leur dada depuis plus de 4 ans maintenant à travers diverses activités culturelles et éducatives, notamment en pérennisant un salon du livre qui a donné vie à trois journées bouillonnantes de rencontres, de débats et de dédicaces. La population avide de savoir et ouverte à la culture et à l'Autre a ouvert les portes de sa bibliothèque Mohya qui rayonnait de mille éclats sous les regards pétillants de joie d'enfants, heureux de toucher au livre, de faire du coloriage, de dessiner, de raconter puis d'écrire des contes qu'ils imaginent eux-mêmes, tout fiers de pouvoir produire quelque chose sous l'œil attendri de Tata Leila qui veille au grain ou face à une Fatima Kerrouche, la maman de "Ninisse la petite berbère", dont la joie du moment présent et la tendresse de l'acte d'écriture étaient perceptibles et communicatifs. Durant trois journées fortement enrichissantes, du 20 au 22 avril, le livre était présent et la lecture célébrait sa fête. Et les lecteurs ont fait connaissance avec des personnages, des sagas et des auteurs qui leur ont donné la soif de lire et l'envie d'en savoir plus sur leurs écrits et leurs intrigues, tel l'auteur italien Riccardo Nicolai qui a fait sensation avec la belle idylle qu'il est venu raconter ; celle d'un certain "Ali Piccinin, un enfant de Morteto, emmené à Alger où il a fait fortune grâce à ses dons de pirate irréductible..." ; un certain Ali Bitchin, qui a construit une certaine mosquée à Alger pour l'amour d'une certaine princesse qui a vécu à une certaine époque. L'auteur nous dit qu'il a entendu parler de cette belle histoire un jour un peu par hasard dans son village italien de Massa, ce qui a suscité sa curiosité jusqu'à lui donner envie d'entamer des recherches, de contacter des personnes, puis de venir à Alger déterrer ce passé méconnu et nous faire découvrir un pan de notre histoire qui remonte au XVIe siècle et qu'il a voulu donner à lire d'abord au lecteur italien, puis au lecteur francophone à travers la traduction de son ouvrage Ali Bitchin - Pour l'amour d'une princesse, paru aux éditions Koukou. Puis d'autres âmes sont venues planer dans l'air de la bibliothèque de Boudjima, telle Hizya dans l'intervention de Maissa Bey, Mouloud Mammeri par le biais de Malika Boukhelou, ou encore le défunt Nabil Farès à travers les témoignages d'Arezki Metref, Benmohamed et Noureddine Sadi. Parmi la floraison des auteurs invités, Samir Toumi a intrigué l'assistance en évoquant son personnage qui voit son visage s'effacer face à son miroir, puis a cédé son cri à Youcef Tounsi venu, lui, lancer son SOS pour sauver son quartier du Ruisseau, les Abattoirs et à travers eux tout notre patrimoine architectural en déperdition à travers son roman Cendres froides paru aux éditions Apic. Abdelmadjid Merdaci, quant à lui, a voulu revenir à l'histoire dans son intervention intitulée "Occultations, résurgences mémorielles, privatisation de la mémoire collective, le sens brouillé de l'histoire nationale", une conférence qui a fait des remous et qui a suscité débats et polémiques autour, entre autres faits, de cette expression "un seul héros, le peuple" qui, le constat est là, n'a pas que des adeptes et qui signifierait pour certains l'effacement de certains héros qui ont fait notre révolution. La poésie, la langue et la culture amazighes n'étaient pas en reste, bien au contraire, elles étaient au centre de tous les débats et le point de départ crucial de beaucoup d'interventions, en particulier celle intitulée "Algérie arabe, en finir avec l'imposture", une table ronde animée par Arezki Metref, Hend Sadi, Benmohamed et Malika Arabi, qui s'est voulue une manière de réclamer la réhabilitation de l'histoire et de l'origine amazighe de l'Algérie, sans pour autant nier ou effacer la part de son arabité culturelle et quelque part historique aussi. Une richesse dans la diversité, la pluralité et l'apaisement, au milieu de citoyens assoiffés et d'enfants ravis, dans une commune engagée et partie prenante de l'acte culturel et en présence d'éditeurs conscients que le livre doit être pour tous et partout... Tel est le Salon du livre de Boudjima qui donne rendez-vous à ses habitués en avril 2018 pour une nouvelle édition qu'il souhaite meilleure et améliorée. Samira Bendris-Oulebsir