L'Onil compte identifier tous les distributeurs avec noms et prénoms, leurs clients, les endroits couverts, afin de suivre le cheminement de la production. Des pratiques commerciales illicites que l'on croyait, à jamais révolues, refont surface sur le marché national. La vente concomitante devenue monnaie courante dans les souks el-fellah durant les années 1980 est de retour dans plusieurs espaces commerciaux. Aucune filière ou branche d'activité n'est épargnée par ce phénomène. Ce "commerce sous conditions", interdit, faut-il le préciser, par les règles de l'économie de marché, cible l'un des produits les plus demandés et les mieux protégés par l'Etat, à savoir le lait subventionné en sachet de 25 DA ! Dans certaines localités, pour qu'un citoyen puisse acheter deux litres de cet aliment, il doit obligatoirement s'"acquitter" d'un sachet de lait de vache à 50 DA... C'est de cette manière que ces commerçants indélicats interprètent le libre commerce et la liberté des prix, choix économiques, pour lesquels a opté l'Algérie en perspective de son adhésion à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Pour eux, ce sont les laiteries fournisseuses qui leur imposent cette formule antiréglementaire. La concomitance s'incruste ainsi dans les transactions commerciales à la fois des détaillants et des grossistes. Car les unités de production relevant des secteurs privé et... public s'adonnent elles-mêmes à ce procédé commercial qu'on pensait abandonné il y a des décennies dans notre pays. "Un litre de lait cru pour deux litres de lait pasteurisé." Telle est la règle observée par les différents intervenants dans cette filière. Cet accord, tacite ou imposé, entre fournisseur et acheteur, s'est généralisé à toutes les régions du pays au point de devenir un sport national. Pourtant, la réglementation en vigueur qui régit les pratiques commerciales sont claires. Spéculation Ni l'éthique ni les sanctions prévues par la loi et encore moins les agents contrôleurs n'inquiètent, semble-t-il, ces revendeurs de lait inconséquents. L'on s'interroge, néanmoins, sur les raisons qui ont poussé ces commerçants fraudeurs à infliger cette sorte de vente des temps révolus aux consommateurs avec, en sus, une hausse du prix à 30 DA. Cela aurait-il un lien avec une quelconque réduction des quantités de poudre de lait, comme ils l'ont affirmé ? "Non. Jamais", déclare, tout de go, Fethi Messar, directeur général de l'Office national interprofessionnel du lait (Onil), contacté hier. "Nous n'avons pas procédé à des diminutions de lots de matière première destinés aux laiteries", avoue-t-il. Mieux, le groupe Giplait, annonce M. Messar, verra sa part en poudre de lait augmenter de plus de 20% à l'occasion du mois de Ramadhan. C'est dire que l'Onil ne souffre aucunement d'un problème de disponibilité en matière première d'autant plus que, tel que l'explique le DG, les stocks emmagasinés tiendront jusqu'à la fin de l'année en cours, soit une prévision de 8 mois. L'office n'est pas confronté, estime-t-il, à un manque de financement pour importer ce produit. "C'est un problème de spéculation qui se situe au niveau de la distribution", souligne M. Messar. Ce responsable trouve illogique qu'avec les mêmes quantités fournies en poudre, les laiteries produisent moins ! "L'on déduit que la poudre servie prend une autre destination que la production du lait en sachet subventionné. Son utilisation est autre que celle de la production du lait", révèle-t-il. Face à une telle situation, l'Onil décide d'instaurer un contrôle plus rigoureux du créneau de la distribution. Une réunion sera, à ce propos, tenue incessamment avec les directions concernées au ministère du Commerce dans le but d'identifier tous les distributeurs avec noms et prénoms, leurs clients, les endroits couverts... afin de suivre le cheminement de toute la production. B. K.