Le chef de l'Etat a surtout plaidé en faveur d'un dialogue des civilisations. Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a déclaré hier à Paris que “la lutte contre le terrorisme est l'affaire de tous, et à tous les niveaux, et elle nécessite un effort multidimensionnel solidaire de tous les Etats et de tous les peuples, des deux ensembles civilisationnels”. Dans un long discours prononcé devant les participants à la conférence sur “Le dialogue entre les civilisations : un facteur de paix et de progrès pour l'humanité”, organisée au siège de l'Unesco, M. Bouteflika a estimé que “la lutte implacable” contre ce phénomène “ne peut être efficace que sur la base d'une stratégie de neutralisation et d'isolement des groupes terroristes”. Le président Bouteflika, qui n'a pas manqué de mettre l'accent sur les souffrances qu'a endurées l'Algérie “touchée de plein fouet par le terrorisme, longtemps, trop longtemps dans l'indifférence générale”, a considéré que “la mise en œuvre, méthodique et systématique d'une telle stratégie, à l'échelle de la planète tout entière est à l'heure actuelle subordonnée à une définition universellement admise du terrorisme”. Il préconise, à ce propos, une alliance des civilisations des deux rives de la Méditerranée qui, d'après lui, “pourrait se donner pour objectif d'isoler le terrorisme en le définissant avec précision et en le différenciant clairement de la violence à peine tolérable et portant légitime des peuples en lutte, pour recouvrer leurs droits nationaux”. M. Bouteflika, qui s'exprimait devant un parterre de personnalités venues du monde entier, a souligné que cette bataille contre le terrorisme doit aussi passer par un effort à consentir pour améliorer les conditions sociales des couches les plus pauvres de la population qui constituent un vivier immense pour le terrorisme. “Si la collaboration des services de sécurité des différents Etats est essentielle, un énorme travail doit être accompli, à l'échelle intercivilisationnelle, sur les terrains politique, économique et culturel, tant il est vrai que le terrorisme, pour exécrable qu'il soit, est toujours et partout l'expression exacerbée d'un malaise social et civilisationnel”, a-t-il dit. Dans sa longue allocution, M. Bouteflika a surtout plaidé en faveur d'un dialogue des civilisations qui constitue, a-t-il dit, “un contre-feu pacifiant à l'idéologie guerrière du “choc” capable de la faire refluer”. Pour lui, “généraliser, organiser la prise de conscience de la solidarité différentielle des civilisations est la meilleure riposte que l'humanité peut faire aux tenants du choc des civilisations”, car, explique-t-il, “la vague de terrorisme que certaines parties du monde musulman ont connue doit être prise et combattue pour ce qu'elle est : une perversion, une "obviation" provisoire des valeurs centrales de la civilisation musulmane par des groupes structurellement marginaux, et non les prodromes d'une confrontation guerrière généralisée, entre la civilisation musulmane et l'Occident”. M. Bouteflika a, dans le même ordre d'idées, critiqué le projet américain de Grand Moyen-Orient qu'il a considéré comme une “réactivation fantasmatique de la croisade”, tout en condamnant “la remise en cause du système multilatéral de coopération internationale” et “la réduction de l'aide publique au développement” par les pays développés. Mais, dans le même temps, il a lancé un appel au monde arabo-musulman pour combler “les immenses retards accumulés (...) en matière de développement économique, de démocratie, de droits de l'Homme et de modernité”. H. S.