Si le débat sur la réconciliation est largement enclenché dans le monde arabe, chaque pays lui donne l'interprétation qui lui convient et lui assigne ses propres objectifs. C'est ce qui ressort, en substance, du 1er Forum des parlementaires arabes, organisé depuis hier par le groupe parlementaire du MSP dans l'enceinte de l'Assemblée nationale. Le thème de la rencontre, centré autour de la problématique “du rôle du parlementaire dans l'application des réformes et la concrétisation de la réconciliation”, n'a pas été choisi fortuitement par les élus du parti dirigé par Bouguerra Soltani. “Nous avons voulu créer un espace permanent de dialogue et de concertation entre les parlementaires arabes. Nous lui avons choisi un thème d'actualité dans le monde arabe”, nous a expliqué Fateh Guerd, vice-président du groupe parlementaire à l'APN. Les dirigeants de plusieurs Etats, dont le Maroc, l'Egypte, le Soudan, la Jordanie… et évidemment l'Algérie, ont engagé des réformes dans divers domaines. Ils prônent, dans le même temps, la réconciliation comme leitmotiv d'un changement. Mais se réconcilier avec qui et pourquoi ? La question est quelque peu tranchée en Algérie, puisque le président de la République conçoit sa politique comme une porte de sortie de la crise sécuritaire. D'un point de vue basique, le challenge est de réconcilier les terroristes avec leurs victimes ou du moins atténuer les rancœurs qui habitent ceux qui ont payé un lourd tribut à la violence intégriste. Selon un membre de la Chambre marocaine des représentants, la volonté du souverain Mohammed VI, à travers l'installation de la commission nationale de réconciliation, est d'effacer des mémoires, et pourquoi pas de l'histoire, la page noire de la persécution des opposants au palais royal. Un parlementaire du Bahreïn a affirmé que son pays s'est lancé dans les réformes économiques et sociales après avoir mené à bien la réconciliation avec les opposants au régime en place. “Tous les détenus politiques ont été élargis, tandis que les exilés ont pu retourner dans la patrie sans aucune crainte de représailles”. La députée palestinienne, Leïla Khalid a estimé, pour sa part, que la démarche devrait toucher les régimes arabes, “qui ne se mettent presque jamais d'accord sur des questions fondamentales”. Elle a ajouté que ces régimes doivent faire l'objet, en parallèle, de profondes réformes de leurs lois et de leurs pratiques, afin de se conformer aux règles démocratiques. Cet avis est partagé par Hussain Mohamed Ebrahim (élu indépendant à l'Assemblée égyptienne), qui a affirmé que “les pays arabes, malgré leurs nombreux dénominateurs communs, ne savent pas transcender leurs divergences. Ils doivent se réconcilier entre eux s'ils veulent construire un pool aussi fort que l'Europe”. Plus offensif, son collègue, Mohamed Mendouh El-Ezbaoui (affilié à l'Organisation des frères musulmans, interdite en Egypte) a soutenu que “les autorités égyptiennes sont tenues de se réconcilier avec le peuple”. De son avis, elles doivent commencer par lever l'état d'urgence, en vigueur depuis l'assassinat du président Anouar Saddate en 1981 et toutes les lois d'exception, notamment celle autorisant la traduction de civils devant des tribunaux militaires. Les députés du MSP, dont le président Bouguerra Soltani, ont justement insisté sur le renforcement du rôle du Parlement dans la mise en œuvre des grands projets politiques. S. H.