Monsieur Tebboune, félicitations pour votre nomination à la tête de notre gouvernement. Dès votre prise de fonctions, vous avez défini vos priorités : " Une autre priorité s'impose c'est la reconversion de notre économie. Une reconversion économique nécessaire et urgente pour faire en sorte que notre pays ne dépende plus des fluctuations des prix des hydrocarbures " (Source TSA). Cela a le mérite d'être clair, du moins sur l'objectif à atteindre -le quoi-, nous attendons de voir le comment. Afin d'y arriver, permettez-moi de vous suggérer une piste qui n'a, semble-t-il, pas effleuré les pensées de vos prédécesseurs : donner la priorité absolue aux nouvelles technologies. En effet, ceux-là ont sous-estimé l'importance et le potentiel que représente le secteur des nouvelles technologies pour le salut de notre économie. Savez-vous, Monsieur le premier ministre, que le chiffre d'affaires cumulé des 4 meilleures entreprises technologiques dans le monde appelées communément GAFA (Google/Apple/Facebook/Amazon) représente aujourd'hui plus de 470 Milliards de dollars, soit 3 fois le PIB de l'Algérie ! Incontestablement, notre pays a les moyens de s'ériger en acteur incontournable des TICs au niveau mondial. Mais les faits contredisent la théorie, car si l'apport des TIC représente entre 7 à 10% du PIB chez nos voisins du Maghreb, il n'est que de 3 à 4% chez nous. Il faut donc redoubler d'efforts pour s'imposer comme une référence dans la région et attirer les investissements étrangers dans ce domaine, surtout lorsqu'on sait que même des pays leaders, comme la France de Monsieur MACRON qui promet pas moins de 10 milliards de dollars pour les start-ups, ne cessent d'investir pour consolider leur position. Si la priorité est donnée à ce secteur, cela permettra d'une part de régler certaines problématiques locales, d'améliorer la vie de tous les jours et d'autre part d'assurer un apport remarquable au PIB par l'exportation de services IT. Voici quelques exemples qui illustrent la chose : * La mise en place rapide du paiement électronique et de l'e-administration stimuleront la consommation et soutiendront les flux économiques, ils seront ainsi un levier de croissance indéniable. Il en résultera même des effets inattendus tel que la réduction des embouteillages car le e-commerce permet l'optimisation de la logistique des livraisons et l'e-administration contribuera par la dématérialisation à la réduction des déplacements pour des besoins administratifs. * Encourager les entreprises à aller vers la digitalisation en les accompagnants dans la mise en œuvre de véritables stratégies des systèmes d'information fiables, performants et sécurisés et en déployant des systèmes intégrés comme les ERP (Progiciel de Gestion Intégré) et les CRM (Logiciel de Gestion de la Relation Clients). * Créer par la suite des champions capables de délivrer des projets IT de développement de logiciels et d'infogérance au niveau local, puis en mode nearshore et offshore* pour exporter leur savoir-faire. * Le développement logiciel devant également être soutenu par l'essor des infrastructures matérielles, il faudra encourager et faciliter la création de Datacenters, le lancement de projets de fabrications ou d'assemblage dudit matériel et enfin améliorer les réseaux haut débit existants pour les mettre en relation sans altérer leurs performances. Bien évidemment, vouloir réaliser cela dans les plus brefs délais afin d'augmenter nos chances de rester compétitifs face à d'autres pays de la région et attirer le plus de projets IT nécessite d'autres actions absolument primordiales pour l'atteinte des objectifs susmentionnés, nous pourrions par exemple : * Créer un cadre réglementaire spécifique très souple face aux exigences d'agilité dont ont besoin les prestataires IT et les start-ups différent de ce qui est appliqué aux entreprises des autres secteurs d'activité, * (Ré) Ouvrir la concurrence pour les fournisseurs d'accès à Internet en encourageant les prestataires qui investissent dans le développement des infrastructures modernes comme les réseaux de fibre optique et les centres de données, * Revoir en profondeur les règles en vigueur sur la régulation des changes, les exportations et les procédures bancaires afin de faciliter la création de richesses et la captation d'opportunités à l'étranger et le rapatriement des devises dans un climat serein, * Mettre en place des parcours de formations spécialisées dans les métiers du web et de la programmation et promouvoir ces pratiques en les intégrant très tôt dans le cursus scolaire, * Inciter les acteurs économiques à intégrer ces cursus de formations dans leurs stratégies RH, * Investir massivement dans la promotion des entreprises de services informatiques au niveau international lors d'événements business et les favoriser au niveau national face aux entreprises étrangères excepté lorsqu'il s'agit de groupements. Comme tout développement d'une activité nouvelle, cela permettra la création de postes d'emploi et de richesses qui viendront à leur tour stimuler d'autres secteurs qui sont liés au secteur technologique tel que l'industrie et le tourisme. Monsieur le Premier ministre, il y a pléthore d'experts des nouvelles technologies en Algérie qui se sont distingués au niveau mondial par leurs compétences et leur maîtrise de ces sujets aussi bien d'un aspect technique que stratégique. En plus de pouvoir développer des équivalents de la taille de la Sonatrach en termes de revenu, ils vous aideront à atteindre plus tôt cette reconversion économique et cette indépendance aux hydrocarbures que vous souhaitez tant, en jouant le rôle de locomotive. Ils pourront vous conseiller bien plus encore si vous leur donnez l'occasion de s'exprimer, mais surtout si vous les impliquez réellement dans la préparation des futurs projets de lois relatifs à notre secteur en les rendant, une fois pour toute, acteurs de leurs domaines d'activité au lieu de demeurer d'éternels spectateurs ou commentateurs. Je suis persuadé que ce message trouvera un écho favorable de votre part monsieur le premier ministre et que vous saurez accorder à notre secteur du numérique la place qui lui revient, le temps presse et la technologie n'attend personne, elle s'offre à ceux qui la courtise. Lamine GHEMATI Consultant en systèmes d'information * : délocalisation des activités de service ou de production vers des pays à bas salaire. (Wikipédia) (*): Les contributions publiées sur Liberte-algerie.com relèvent exclusivement de la responsabilité de leurs auteurs