Comme souvent, le président de la République, qui égrène les multiples réalisations durant son règne, impute les causes de la crise à des facteurs exogènes. L'Algérie entre-t-elle de plain-pied dans une période de vaches maigres ? Si le propos est toujours mesuré, histoire de rassurer maintenant que les signes d'inquiétudes s'expriment çà et là, il n'en cache pas moins quelques aveux sur la sévérité de la crise qui frappe de plein fouet le pays et qui risque de s'inscrire dans la durée si des réformes audacieuses ne sont pas engagées. Dans son message hier à la nation, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a admis que l'Algérie est confrontée "à un sévère recul de ses revenus" et que les réserves de change "s'érodent". "Dans le domaine économique, notre pays est confronté à un sévère recul de ses revenus extérieurs et à une dégradation de sa balance des paiements extérieurs, même s'il garde encore intacte sa souveraineté de décision économique et sociale grâce aux réserves de change accumulées, mais qui s'érodent déjà", a admis le chef de l'Etat dans son message à la nation à l'occasion du 55e anniversaire de la Fête nationale de l'indépendance et de la jeunesse. Face à cette situation, Bouteflika appelle les Algériens à se retrousser les manches et suggère, en filigrane, qu'ils doivent supporter les contrecoups des réformes appelées à être initiées par le gouvernement, allusion probablement à la révision des subventions et à la rationalisation des transferts sociaux qui, jusque-là, ont assuré quelque relative prospérité aux ménages à faible revenu. "Devant cette situation qui interpelle chacun de nous, et en cette occasion commémorative de nos lourds sacrifices pour le recouvrement de notre indépendance, je renouvelle mon appel à notre vaillant peuple à s'atteler davantage à l'effort et à mettre en œuvre, souverainement, les réformes économiques nécessaires. L'Algérie ne manque ni de ressources ni d'atouts, loin s'en faut, qu'il s'agisse de l'agriculture, du tourisme, du potentiel industriel ou des ressources énergétiques fossiles et renouvelables", dit-il, ajoutant que "toutes ces ressources et ces atouts doivent être valorisés davantage grâce à une réhabilitation de la valeur du travail, à l'amélioration de l'environnement de l'activité économique et à la concrétisation diligente de l'ensemble des réformes nécessaires". Pour le président de la République, le gouvernement est déjà sur les starting-blocks et il ne reste qu'au peuple de participer à ce qui s'apparente à un effort de guerre. "Le gouvernement est mobilisé autour de ces différentes tâches requises pour accélérer le développement économique national ainsi que la diversification de nos exportations. Il reste que cet engagement doit être partagé par chacun, dès lors que l'enjeu est notre avenir national ainsi que le devenir de nos générations montantes." Comme souvent, Bouteflika, qui égrène les multiples réalisations durant son règne, impute les causes de la crise à des facteurs exogènes. "C'est toute cette dynamique de progrès substantiels et accélérés qui est contrariée, depuis trois années, par les effets de la crise économique mondiale et de son impact sur le marché mondial des hydrocarbures. Les revenus extérieurs de l'Etat ont été divisés par près de trois entre 2008 et aujourd'hui, provoquant ainsi une forte pression sur la dépense publique, laquelle demeure le moteur essentiel de l'économie nationale et de la modernisation infrastructurelle du pays", soutient-il. Mais il se félicite d'avoir redressé le pays après la "tragédie" des années 90 et "l'érosion" de la souveraineté économique alors. "Depuis dix-huit années, j'ai le grand honneur de guider vos pas, fort de votre confiance, et nous avons rebâti ce qui a été détruit et construit davantage encore. Nous avons fait avancer le pays dans tous les domaines (...)", se réjouit-il, avant d'annoncer, par ailleurs, la mise en place au courant de l'année du Haut Conseil de la jeunesse et du Cnes rénové. "L'armée a pris le dessus sur les groupuscules terroristes" Si sur le plan économique, les signaux sont au rouge, au plan sécuritaire, la situation prête à l'optimisme puisque, de l'avis du chef de l'Etat, l'Armée nationale populaire, à laquelle il a rendu un hommage appuyé, a pris le dessus sur les "derniers groupuscules terroristes". "Concernant la préservation de l'intégrité de notre territoire et de la sécurité de nos citoyens et de leurs biens, je voudrais, en votre nom à tous, rendre un vibrant hommage mérité à l'Armée nationale populaire, digne héritière de l'Armée de libération nationale, pour le courage, le professionnalisme et le sens du sacrifice par lesquels elle a réussi à prendre largement le dessus sur les derniers groupuscules terroristes qui sévissent à travers notre vaste pays, avec le concours des différents services de sécurité." Tout en s'inclinant à la mémoire de "ceux qui sont tombés ces derniers mois", parmi les éléments des services de sécurité, le président Bouteflika salue les "efforts et l'efficacité" de nos forces déployées aux frontières, "une vigilance qui accompagne les efforts de notre diplomatie pour hâter la restauration de la paix, de l'unité et de la réconciliation, au Mali et en Libye, frères et voisins", dit-il. Karim Kebir