Au cours des six premiers mois de l'année, la Croix-Rouge italienne dit avoir aidé quelque 94 000 personnes en Méditerranée. Mais depuis quelques semaines, ses membres affirment avoir de plus en plus de difficultés à opérer, notamment près des côtes libyennes. Le président de la Croix-Rouge italienne, Francesco Rocca, a vivement dénoncé, jeudi soir, à l'ONU la récente interdiction faite aux ONG de patrouiller au large de la Libye pour secourir des migrants, qui contrevient selon lui au droit international, ont rapporté, hier, les agences de presse. Selon lui, il n'y a plus d'accès humanitaire dans les eaux internationales au large de la Libye, du fait d'une création le 10 août par la Marine de ce pays d'une nouvelle zone de recherche et de sauvetage (SAR) sous sa responsabilité directe. Son accès est interdit aux navires étrangers afin d'en éloigner les ONG, accusées par Tripoli de collusion avec les réseaux de passeurs. Francesco Rossa a précisé que cette zone s'étendait sur quelque 100 km en Méditerranée à partir des côtes libyennes, et concernait du coup des eaux internationales. Selon le patron de la Croix-Rouge italienne, il s'agit d'une décision illégale au regard du droit international. "Trop ! c'est trop ! Vous ne pouvez empêcher le désespoir des gens, vous devez créer des couloirs humanitaires sécurisés et développer l'information dans les pays pour les gens qui décident de partir", a-t-il affirmé à des journalistes après un entretien avec le secrétaire général de l'ONU, le Portugais Antonio Guterres. "L'Union européenne n'est pas pro-active sur cette question", a-t-il déploré en parlant d'échec européen. "Nous parlons de vie, de dignité pour des dizaines de milliers de personnes, de la Convention de Genève pour les réfugiés !", s'est-il emporté. La Croix-Rouge italienne compte 160 000 volontaires qui travaillent principalement dans les ports italiens. Au cours des 6 premiers mois de l'année, elle dit avoir aidé quelque 94 000 personnes. À la suite de l'interdiction libyenne, perçue comme une menace, et quelques jours après des tirs de sommation des gardes-côtes libyens face à un navire humanitaire près des côtes, plusieurs ONG - MSF, Sea Eye, Save the children, etc, - ont annoncé la suspension de leurs opérations de secours. "Les embarcations de migrants vont être obligées de retourner en Libye, et beaucoup d'enfants et d'adolescents vont mourir en mer", assure le directeur des opérations de Save the children, Rob MacGillivray. Alors que l'Italie a vu débarquer plus de 600 000 migrants sur ses côtes depuis début 2014, et que 14 000 ont péri en mer, les arrivées ont marqué cet été un net fléchissement : environ 13 500 depuis le 1er juillet, contre 30 500 sur la même période en 2016. Pour rappel, l'Italie a imposé aux ONG humanitaires un nouveau code de conduite, avec l'appui de ses pairs au sein de l'Union européenne, en raison de trafics avérés et organisé par certaines organisations opérant en Méditerranée et qui seraient en lien avec les réseaux de migrations clandestine vers l'Europe. R. I./Agences