Intervenant le jour même de la tenue d'un mini-sommet euro-africain sur la crise de réfugiés et de migrants dans la capitale française, la publication de ce rapport remet en cause l'idée de création de centres de transit, prônée par Paris et ses alliés à Bruxelles. Comment peut-on régler la crise de migrants et de réfugiés qui "déferlent" sur l'Europe, en provenance du continent africain, via la Libye ? C'est la mission à laquelle s'est attelé, hier, le mini-sommet euro-africain, convoqué par le président français Emmanuel Macron, à Paris, en présence de ses homologues tchadien et nigérien, Idriss Deby Itno et Mahamadou Issoufou, ainsi que le chef du gouvernement d'entente nationale libyen Fayez al-Sarraj. Côté européen, étaient présents la chancelière allemande Angela Merkel, les chefs de gouvernement italien et espagnol, Paolo Gentiloni et Mariano Rajoy, ainsi que la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini. Outre la sécurisation des frontières, les présents à cette deuxième rencontre du genre à Paris ont discuté de la création de centres de transit en Libye, au Niger et au Tchad, pour empêcher les candidats à rejoindre l'"eldorado" européen, de traverser la Méditerranée devenue, depuis quelques années, un vaste cimetière pour des milliers d'hommes et de femmes en détresse. Au départ, M. Macron a proposé la création de "hotspots" en Libye, une idée dénoncée par les ONG qui ont déjà eu à vérifier la mauvaise expérience de ce genre de centre en Grèce. De son côté, Berlin a tenté aussi de convaincre les pays d'Afrique du Nord et du Sahel d'installer chez eux des centres d'accueil, mais en vain, surtout que ces mêmes pays sont aussi des pourvoyeurs de migrants clandestins. Mais le problème est ailleurs. L'Europe refuse de traiter la crise migratoire et de réfugiés comme un problème politique, préférant réserver à ce drame humain un traitement sécuritaire qui, en aucun, ne peut dissuader ces milliers de personnes persécutées dans leurs pays aux régimes soutenus par des membres de l'UE. C'est à cette vérité, en effet, que les Etats européens tentent de se dérober, laissant des milliers de personnes à la merci des réseaux de traite des humains, de la mer Méditerranée et à celle des autorités libyennes, accusées maintes fois par l'ONU et les ONG de bafouer les droits élémentaires des migrants détenus en Libye. D'ailleurs, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a lancé, hier, un appel à ces mêmes autorités libyennes pour "relâcher immédiatement" les migrants les plus vulnérables détenus en Libye, s'appuyant sur un rapport qui dénonce des atteintes aux droits de l'Homme dans ce pays. "Les migrants continuent d'être victimes de violences extrêmes par des trafiquants, des passeurs, des membres de groupes armés et des forces de sécurité", a affirmé Antonio Guterres dans ce document, en citant travail forcé, détention arbitraire et viols. Des représentants de la petite mission de l'ONU en Libye (Unsmil) se sont rendus dans des centres de détention dépendant du département libyen combattant la migration illégale à Gharyan, Tripoli, Misrata et Surman, "où des milliers de migrants sont détenus arbitrairement pour de longues périodes sans possibilité de s'opposer légalement à leur détention", a précisé le secrétaire général de l'ONU. Lyès Menacer