"La génération des jeunes déteste la génération qui gouverne et elle ira vers son affrontement en sacrifiant la génération charnière, celle des technocrates postindépendance", affirme Nacer Djabi. Le sociologue et chercheur, Nacer Djabi, a donné, samedi dernier, au campus d'été de la Jeunesse libre du RCD (JLRCD) une conférence pertinente sur le thème : "Crise politique et la transition démocratique". Dans son intervention, l'orateur a conclu que "l'Algérie est confrontée à deux scénarios pour le changement" avant de les énumérer plus longuement au fil des minutes. En effet, dans son analyse de la situation politique du pays, M. Djabi a expliqué avec pédagogie comment le pays est confronté à ces deux options inéluctables pour un changement en Algérie. Contrairement à l'ancien chef de gouvernement, Sid-Ahmed Ghozali, qui avait expliqué à la même tribune que ce n'est pas un problème de génération dépassée par les événements, Nacer Djabi affirme, quant à lui, que "le conflit est générationnel". Et ces deux scénarios pour un changement sont, expliquera-t-il, une transition réussie sur la base d'un consensus et des élections libres et transparentes. Une transition pacifique qu'il a qualifiée d'optimiste. Et le second scénario, qu'il a qualifié de pessimiste, viendra par la rue. Et il sera mené par les jeunes pour faire déguerpir le pouvoir avec les conséquences qui peuvent en découler. Le conférencier est arrivé à cette conclusion après avoir longuement développé "le conflit générationnel qui traverse la sphère politique nationale". Selon lui, il est impératif que les élites et les institutions viables s'impliquent afin d'arriver à construire un changement en dépit de la difficulté de la tâche, en raison des mauvais facteurs économiques et sociaux qui rendent cette nécessité de changement, une transition démocratique, très ardue et compliquée en ces moments de crise que vit le pays. "L'Algérie a raté à deux reprises l'occasion d'aller vers un changement. La première fois, durant les années 1990 et la seconde fois dans les années 2000", soutient le conférencier. Et de préciser plus loin que "durant les années 90, la négociation était quasi impossible du fait de l'immuabilité des lignes et durant les années 2000, le pays a connu une embellie financière, mais le système a choisi le clientélisme des franges de la société par la corruption et les passe-droits". Partant de ce constat sans appel, M. Djabi note qu'aujourd'hui, "il n'y a aucune cohésion dans le discours officiel des gouvernants". Les "mésententes et les rumeurs" torpillent, soutient-il, toute discussion entre les acteurs politiques afin de dégager "un consensus réel" sur les voies et moyens à mettre en œuvre pour parvenir à une transition démocratique. L'orateur soutient que si la transition démocratique doit avoir lieu un jour, elle viendra par le facteur "démographique" et non "générationnel". Plus explicite, le conférencier relève que la composante politique nationale est composée de trois générations. La première, selon lui, est une génération minoritaire en termes de démographie, mais gouvernante depuis la guerre de Libération nationale, et qui refuse de lâcher les rênes du pouvoir. La deuxième est celle des technocrates postindépendance, qui a édifié l'Etat et gère le pays et qui rêve d'accéder au pouvoir, mais n'ose pas affronter la première. Enfin, la troisième génération est celle de la jeunesse très forte numériquement. Une génération de jeunes, analyse-t-il, qui ne rencontre pas les deux premières en raison des cloisonnements érigés depuis l'indépendance. "La génération des jeunes déteste la génération qui gouverne et elle ira vers son affrontement en sacrifiant la génération charnière, celle des technocrates postindépendance", selon le conférencier. Autrement dit, c'est le deuxième scénario pour le changement qui est le plus plausible dans l'état actuel des choses et de l'évolution du pays. L. OUBIRA