RESUME : Quinze ans ont passé depuis que Djamila est veuve. Durant toutes ces années, elle s'est consacrée à ses enfants. Ces derniers, maintenant, ont fait leur vie. Elle est fière d'eux. Un jour au cabinet, le fils d'un patient discute avec elle. Il a le don de la mettre mal à l'aise. À la mort de son mari, Djamila a eu bien des demandes en mariage. Elle plaisait encore. Chaque année passée avait apporté son lot de prétendants. Même ses beaux-parents avaient voulu qu'elle refasse sa vie avec un membre de la famille. Mais à tous, elle avait dit non. Elle s'était contentée de vivre pour ses enfants. Elle n'avait pas vu le temps passer. Ils ont vite grandi. Ils ont pris leurs décisions. Elle n'a jamais cherché à retenir Salim, quand il lui avait parlé d'avoir son propre appartement. Elle ne veut que leur bonheur. Et si ses enfants peuvent le trouver en vivant loin d'elle, elle a accepté. Cette séparation leur a permis de se rapprocher encore plus. Elle reconnaît, sans joie, que la maison est bien triste depuis le départ de ses enfants. Maintenant, elle ne vit que pour elle-même. Jamais elle ne leur en a voulu de vouloir faire leur vie. Elle les a toujours respectés et c'est pour cela, sans doute, qu'ils sont restés si proches. Ce jour-là, elle ne rentrera pas tout de suite chez elle. Elle passera chez l'épicier et effectuera quelques achats. Puis, elle rentre. Comme d'habitude, elle allume la radio de la cuisine, puis elle s'occupe de ranger les achats. Elle est lasse et décide d'aller se détendre dans le salon. Elle remarque la porte fermée. D'habitude, elle laisse la porte ouverte. Elle s'étonne de l'avoir fermée et d'avoir oublié ce détail. Quand elle l'ouvre, elle a un sursaut de surprise. - Joyeux anniversaire maman ! Les cris de joie de ses enfants, venus lui faire la surprise, se mêlent aussi aux siens. Les embrassades et les étreintes durent un moment. La surprise passée, elle s'assoie sur le canapé, entourée de Nadia et de Karim. Salim sort un gâteau du garde-manger et allume six bougies. Cinq sont blanches et la sixième est rose. - Pourquoi ? - Je ne voulais pas te peiner en mettant cinquante et une bougies. Alors, dit Salim, les blanches pour les dizaines et la rose pour le un de cinquante. Tu comprends ? - Comment aurais-tu pu me peiner ? lui demande-t-elle. Il y a longtemps que je n'ai plus trente ans. - Un vœu, dit Nadia. Un vœu. Tout le bonheur du monde pour mes enfants, souhaite Djamila en son for intérieur, avant de souffler les bougies. - Et voilà les cadeaux. Djamila pleure d'émotion. Elle avait complètement oublié son anniversaire. Elle n'est plus si jeune. Depuis que les enfants ne vivent plus à la maison, elle ne l'avait plus fêté. Aujourd'hui, ils l'avaient surprise. Ils s'étaient entendus pour se retrouver ici et fêter son anniversaire. Ils s'étaient occupés de tout, pour lui faire plaisir. - Pourquoi pleures-tu maman ? - Je suis bouleversée. Vous m'avez surprise. - Tu ne croyais tout de même pas qu'on allait oublier ton anniversaire, dit Salim. Tu as consacré toute ta vie pour nous. La moindre des choses est qu'on soit là ce soir ! Et puis, rassure-toi, tu n'es pas si vieille que ça. On dirait que tu as à peine quarante ans. - Ah ! En fait, la remarque de son fils ne la surprend pas. Elle se rappelle le regard de Madjid et elle se demande, avec l'ombre d'un sourire, s'il a cru qu'elle est aussi jeune qu'elle ne le paraît. (À suivre) A. K. [email protected]