Sidi-Saïd et Zebbar Benrabah ont montré hier la conduite à tenir aux syndicats autonomes. Les gestionnaires des établissements sanitaires publics veulent visiblement se faire une place au soleil parmi la grande famille de la santé. Hier, et à l'occasion de la tenue d'une rencontre euro-méditerranéenne sur la gestion des établissements de la santé à l'hôtel Sheraton, le syndicat des gestionnaires de la santé (SGS) a fait un véritable plaidoyer en faveur de la réhabilitation de leur profession. Manifestement courroucé de voir les différents acteurs du corps médical bénéficier de majorations de salaires et autres relèvements indemnitaires, le président du SGS et néanmoins directeur du CHU de Blida, Benrabah Zebbar, a trouvé un moyen très efficace de se faire entendre. Associer la centrale syndicale à son entreprise revendicative pour faire plier le ministère de la santé, mais surtout celui du travail. Pour ce faire, un protocole d'accord a été signé, hier, à l'ouverture du séminaire entre M. Sidi-Saïd et M. Zebbar portant sur la collaboration des deux syndicats pour faire aboutir les préoccupations des gestionnaires des établissements de la santé. En l'occurrence, cette entente est inédite en Algérie entre la puissante centrale syndicale qui abhorre par-dessus tout le pluralisme syndical et une organisation autonome qui, par définition, rejette le monopole de l'UGTA. “Il faut se rendre à l'évidence que l'on ne pourra pas atteindre nos objectifs si l'on ne compte pas sur l'appui précieux de l'UGTA”, lâche, réaliste, le président du SGS. “Quand vous ne siégez pas dans les réunions de négociations avec le gouvernement, il est inutile de prétendre arracher quoi que ce soit”, argue-t-il. Prisonniers de leur statut de fonctionnaire, les directeurs des structures hospitalières s'estiment être les parents pauvres de la santé publique tant en termes de niveau des salaires qu'en termes de prérogatives. La nature “hybride” de leur statut du fait qu'ils dépendent à la fois du ministère de la santé et celui du travail les place dans une position plutôt inconfortable. Et l'organisation de cette rencontre de haut niveau sur la gestion des établissements de santé se veut, avant tout, comme un exposé des motifs sur la nécessité de repenser le rôle du gestionnaire dans le contexte de la réforme hospitalière et, par voie de conséquence, lui donner plus de liberté et une grande marge de manœuvre dans la gestion de son établissement. On comprend d'ailleurs, via l'intitulé des communications, le souci des organisateurs de titiller l'ego du ministère de la santé en se plaçant dans la posture de cadres qui doivent accompagner la réforme. “Gestion des établissements publics de santé, nouvelles exigences et nécessité de la réforme”, “Le rôle et la mission du gestionnaire dans la mise en place de la réforme” et “Le rôle du gestionnaire et son implication dans le renouveau du service public de la santé” sont autant de thèmes qui sont supposés mettre en évidence le caractère “incontournable” du directeur dans la bonne santé d'un établissement de santé publique. C'est en quelque sorte une offre de services que propose le SGS aux pouvoirs publics moyennant une reconsidération professionnelle et évidemment financière. Et comme la rencontre est l'œuvre d'un syndicat, il fallait bien sûr aborder le thème des libertés syndicales qui empoisonne la vie des syndicats autonomes en Algérie, notamment ceux du secteur de la santé. Le représentant de l'organisation internationale du travail (OIT) M. Belhadji a donc donné un cours magistral sur les droits et les libertés syndicales sous le regard subjugué des SG, des praticiens spécialistes, des médecins généralistes, des gestionnaires et des paramédicaux. Doctement, l'envoyé spécial de l'OIT — Tunisien de nationalité — a passé en revue les différentes conventions internationales ratifiées par l'Algérie et qui consacrent le libre exercice de l'activité syndicale. Il note cependant que la convention dite 135, relative à la protection du syndicaliste contre les abus d'autorité, n'a été ratifiée par aucun pays arabe y compris l'Algérie. Le conférencier a également rassuré les présidents des syndicats autonomes que “les pouvoirs publics n'ont strictement aucun droit de regard sur leur fonctionnement sinon l'enquête administrative”. M. Belhadji tout en disant être au courant qu'il y a “beaucoup d'abus” exhorte ses interlocuteurs à fusionner leur appareil pour se faire respecter par le gouvernement. Et le “mariage” célébré hier entre l'UGTA et le SGS est le premier pas vers cette synergie. H. M.