Pour le Collectif du 17 Octobre 1961, cette position est en retrait par rapport à celle tenue par l'ex-président Hollande qui avait évoqué, pour sa part, une "tragédie". L'Elysée a finalement réagi à la requête du Collectif du 17 Octobre 1961. Mais le contenu de sa réponse, qualifiée de "laconique et d'inquiétante" par les signataires, comporte assez clairement une fin de non-recevoir. "Malgré toute l'attention portée à votre demande d'audience, je dois vous indiquer qu'il n'est pas possible d'y répondre favorablement", a indiqué le chef de cabinet de la présidence française dans une lettre postée le 16 octobre et parvenue aux destinataires quatre jours plus tard. Pis, le militant anticolonialiste, Henri Pouillot, qui avait été chargé, au début du mois, de transmettre la demande d'audience du collectif à Emmanuel Macron, évoque un retrait dans la position de l'Etat français qui, désormais, qualifie les massacres "d'évènements". "Soyez (...) assuré qu'il a été pris attentivement connaissance de vos préoccupations et de vos propositions concernant les événements survenus le 17 Octobre 1961 à Paris", a indiqué l'Elysée, exhumant, dans son lexique, un terme peu glorieux utilisé naguère par l'administration coloniale pour réduire la portée de la lutte des Algériens pour leur indépendance. "Pour le nouveau Président, il ne s'agit plus que ‘d'évènements' : on retrouve les termes autrefois employés, niant ainsi le caractère de la guerre de libération de l'Algérie", déplore Henri Pouillot. Selon lui, ce glissement sémantique est une remise en cause des déclarations faites auparavant au sujet des massacres. En 2012, François Hollande avait franchi un pas, en considérant la tuerie comme une "tragédie". L'ancien locataire du Palais de l'Elysée avait en outre condamné ce qu'il a qualifié de "répression sanglante des manifestants" et a rendu hommage à la mémoire des victimes. Sur un ton très solennel, il avait surtout fait savoir que "la république reconnaît les faits avec lucidité". Cet aveu, bien que partiel, avait encouragé les pourfendeurs du déni colonial à réclamer une totale reconnaissance de la responsabilité de l'Etat français dans les massacres du 17 Octobre 1961. Dans sa lettre, le collectif éponyme a demandé à Macron de considérer les assassinats comme un crime d'Etat. Henri Pouillot, les historiens Gilles Manceron et Olivier Le Cour Grandmaison, ainsi que M'hamed Kaki, des associations les Oranges, ont rappelé au jeune chef d'Etat ses engagements en tant que candidat à la présidentielle. Macron avait notamment indiqué qu'il allait "prendre des actes forts" concernant la période coloniale. Dans une visite en Algérie, il avait, en outre, soutenu que la colonisation est un crime contre l'humanité. Ses propos avaient alors provoqué une levée de boucliers de la part des nostalgiques de l'Algérie francaise. Des personnalités à droite et dans l'extrême droite l'avaient également vilipendé, le réduisant finalement au silence. Depuis son arrivée au pouvoir, Macron s'est, en effet, abstenu de tout commentaire, par crainte, sans doute, de ranimer la guerre mémorielle qui pourrait parasiter son mandat. S. L.-K.