Pour sa première sortie à la tête des Verts, le nouveau coach national Rabah Madjer, sans offrir une prestation appréciable aux milliers de supporters algériens entassés au stade Hamlaoui de Constantine, est tout de même parvenu à arracher un nul inespéré en fin de match. Madjer est parvenu du coup à stopper l'hémorragie des défaites pour une équipe qui a perdu ses trois derniers matches officiels, deux fois contre la Zambie et contre le Cameroun, et qui se retrouve désormais dernier de la classe au collège des éliminatoires du Mondial 2018, avec seulement deux bons points dans les valises. Le leader du groupe, le Nigeria, finit le parcours avec 14 points (aucune défaite), soit douze points de plus. L'écart est énorme, vexant même. Pour son entame à la tête des Verts, Madjer était attendu notamment sur deux aspects : psychologique et technico-tactique, deux points qui ont pénalisé les Verts depuis le début des éliminatoires. Outre le fait de motiver un groupe largement atteint sur le plan psychologique (voir papier ci-dessous), Madjer se devait d'apporter des solutions tactiques pour doter les Verts d'un plan de jeu limpide, d'autant plus que les défections pour blessure l'ont obligé à un effort d'imagination, voire d'improvisation. Or, bien avant le début du stage, Madjer a indéniablement commis des erreurs au niveau initial du casting des joueurs (liste élargie des 35), notamment en ce qui concerne le secteur de l'animation du jeu. En effet, le forfait prévisible de Bentaleb (voir notre édition d'hier) et le forfait de Benmghit ont obligé l'entraîneur national à utiliser au milieu de terrain trois éléments, à savoir Medjani, Bennacer et Ferhat qui sont tout sauf des créateurs de jeu. Les forfaits de Bentaleb et Benmghit auraient dû être anticipés par l'insertion dans la liste des 35 de joueurs répondant au même profil, à l'image de Abeid (Dijon), Taider (Bologne), Benkhemassa (USMA), Cherif El-Ouazzani (MCA) ou encore Sidhoum (ESS) pour ne citer que ceux-là. Il aurait pu puiser dans cette liste de réservistes au lieu de bricoler au milieu avec Ferhat et Bennacer, très décevants contre le Nigeria. C'est une maladresse dont le staff technique porte seul la responsabilité. Madjer corrige une erreur par une autre erreur Pour revenir au match, Madjer a opté pour un 4-3-3 classique avec une défense à quatre (Mandi, Nessakh, Cadamuro, Chafaï), un milieu en losange avec Medjani en sentinelle pour équilibrer ce secteur de jeu et la paire Bennacer-Ferhat en appui, et une attaque à trois, deux attaquants francs (Mahrez-Brahimi) et une pointe (Slimani). Premier couac au bout d'une demi-heure de jeu, Madjer sort Nessakh et fait entrer Abdellaoui. Pourquoi ? "Le changement de Nessakh à la demi-heure du jeu a été purement tactique pour éviter toute mauvaise surprise, même s'il s'agit d'un bon élément", répond-il en fin de match. Autrement dit, Madjer s'est aperçu qu'il ne pouvait pas maintenir Nessakh sur le terrain devant le danger adverse sur le couloir droit. De deux choses l'une : ou le coach national ne connaît pas les aptitudes de Nessakh à ce poste, ou il ne connaît pas les capacités de l'adversaire de ce côté-là. Dans les deux cas, c'est une bourde monumentale qu'il ne convient pas de répéter. Pis encore, pour son remplacement, Madjer a choisi Abdellaoui, un gars qui joue plutôt dans l'axe de la défense et qui a déjà montré ses limites à ce poste avec l'USMA. Ceci au moment où Ferhani poireautait sur le banc. En tout état de cause, mis à part le rôle défensif, Abdellaoui n'a été d'aucune aide en attaque, privant Brahimi, très en verve, d'un support indispensable dans le couloir. Avec ce changement imprévu mais évitable, Madjer a brûlé stupidement une carte en perspective des changements de joueurs en seconde période. Madjer a, en fati, corrigé une erreur par une autre erreur. Dans le couloir droit, Madjer a placé sa confiance en Mandi, qui est également un défenseur axial. Là aussi, Mandi n'a été que l'ombre de lui-même, il n'a été d'aucun apport à Mahrez. Il n'a pas réussi à combler le vide laissé par Attal, une pièce indispensable désormais dans l'échiquier de l'EN. Or un Ziti, également sur le banc, était le plus indiqué pour ce rôle. Il aurait été plus utile. Par ailleurs, Madjer a trop tardé pour faire sortir Bennacer et Mahrez, complètement effacés, il aurait pu apporter un souffle nouveau en début de seconde période, en décalant à droite Ferhat ou en incorporant Djabbou, au lieu de laisser Mahrez franchement s'ennuyer sur le terrain, pendant plus d'une heure de jeu. Dans son rôle de sentinelle, Medjani s'est beaucoup battu dans les duels, mais encore une fois, sa relance dans le jeu est aléatoire. Medjani a un sérieux problème avec la maîtrise technique, il ne peut pas constituer une solution pour une équipe qui aspire à faire le jeu. C'est un porteur d'eau avec beaucoup de déchets et d'approximations, exactement l'inverse d'un Abeid, propre dans sa relance. La seule satisfaction vient de Brahimi qui a fait étalage de l'immensité de son talent mais qui a manqué visiblement de soutien, surtout avec un Slimani, certes très entreprenant mais très peu habile. En somme, pour sa première, Madjer a apporté de l'eau au moulin de ceux qui ont critiqué son choix, mais il n'est pas dit qu'il ne peut pas se ressaisir maintenant qu'il connaît mieux son groupe. Rendez-vous mardi, au stade du 5-Juillet, contre la Centrafrique pour un nouvel essai ! SAMIR LAMARI