"Cœur de lion" a mal au... cœur ! Le héros d'Omdurman, l'un des meilleurs défenseurs qu'a enfantés cette terre de football, formé certes dans les centres de formation de France et d'Italie, a poussé hier un véritable coup de gueule, fustigeant sans ambages la dernière décision du bureau fédéral de la FAF, concernant les critères de sélection en équipe nationale des joueurs binationaux. Le titre choisi par le journal qui lui a ouvert hier ses colonnes est d'ailleurs fort révélateur de la colère de "l'homme roc". "J'ai mal au cœur", martèle Antar Yahia dans le journal sportif Compétition, en réaction à la décision du BF d'établir une véritable ségrégation entre les joueurs locaux et les joueurs binationaux, comme cela a été du reste relevé dans les colonnes de Liberté de jeudi. "Qu'il joue en Algérie ou au Danemark, ce sont les meilleurs qu'on recherche, non ? Pourquoi creuser le fossé entre les deux, pourquoi les différencier ? Il y a des Algériens partout dans le monde, on doit prendre les meilleurs. C'est tout. Ça me rend triste. Pourquoi on communique comme ça ? Bien sûr on prend les meilleurs Algériens, bien sûr on prend les joueurs qui s'identifient à l'Algérie. Ceux qui ont fait ça ne se rendent pas compte de l'impact que cela peut avoir. Je trouve maladroit de dire «supérieur techniquement». Et physiquement ça ne compte pas ? Ceux qui prennent ces décisions ou ceux qui les communiquent ne prennent pas en considération comment le vivent ceux qu'ils appellent les «binationaux» ce genre de chose. On les traite comme des produits, comme des choses, alors que se sont des Algériens à 100%. C'est comme ça que le vivent tous les Algériens qui vivent à l'étranger ; joueurs ou parents ressentent la même blessure", martèle-t-il. Antar Yahia se désole que l'on revienne à chaque fois au cliché d'émigré. "Partout on appelle leurs citoyens vivant à l'étranger de l'expatrié, chez nous, on est des émigrés. C'est triste. Je suis déçu de la tournure que prennent les choses, de l'image qu'on dégage actuellement." Pour l'ex-capitaine des Verts, la FAF doit continuer à solliciter des joueurs expatriés pour renforcer les Verts. "Si le joueur veut venir, c'est une chose, s'ils ne veulent pas venir, c'en est une autre. Chacun est libre de ses choix. Mais il faut aller à leur rencontre. Même si la FAF échoue dans un cas ou d'autres, où est le problème ? On a déjà gagné des batailles comme ça et on en a perdu d'autres. Il faut prospecter plutôt. Le Maroc a des joueurs chez les U20. Moi, Laïb m'a appelé en espoir, j'étais à l'Inter. Malheureusement il n'y a pas une évolution en matière de scooting." Pour sa part, Sofiane Feghouli, l'un des héros du Mondial 2014 au Brésil, connu pour son franc-parler, n'a pas mâché encore ses mots pour dire tout haut sa tristesse. "Engagement inconditionnel, supériorité technique, autant de critères qui puent la subjectivité et qui vont poser le soupçon sur chaque convocation", s'est-il empressé de tweeter jeudi sur son compte sur les réseaux sociaux, s'attaquant frontalement du coup à la FAF alors qu'il reste sélectionnable, selon les propos tenus par le coach national Rabah Madjer lors de la dernière conférence de presse. Les propos de Feghouli sont d'autant plus étonnants lorsqu'on rappelle que ce même Feghouli n'a pas tari d'éloges sur la nouvelle direction de la FAF, à la veille de la rencontre contre le Cameroun à Yaoundé (2-0). Feghouli a visiblement vite déchanté. Certes, Feghouli a retiré son tweet, mais le coup est parti. La maladresse de la FAF aussi. Selon nos sources, d'autres joueurs pros ont exprimé en coulisses leur désapprobation, la polémique ne fait que commencer en Algérie et à l'étranger. De son côté, l'ex-international et adjoint de l'EN Nourredine Kourichi n'a pas caché également sa colère et a fustigé la FAF. "La FAF est en train de prendre des décisions dangereuses pour le football algérien. C'est franchement du n'importe quoi, c'est malheureux de diviser les enfants d'un seul peuple, c'est inadmissible" a-t-il martelé à la chaine Dzaïr news. Pour rappel, la FAF a décidé mercredi que "deux critères seront pris en considération pour convoquer un joueur algérien établi à l'étranger dans l'une des sélections nationales : son engagement inconditionnel en faveur de l'Algérie et sa supériorité technique par rapport aux joueurs exerçant en Algérie". SAMIR LAMARI