Hier, à J-1 de la première visite à Alger du nouveau président français, Emmanuel Macron, les services de sécurité et les agents de nettoyage mobilisés par la wilaya et les deux communes de la capitale, Alger-Centre et Sidi M'hamed, étaient sur les dents. Il ne fallait surtout rien oublier pour assurer un accueil triomphal à l'invité d'El-Mouradia. De Netcom, spécialisée dans le ramassage des ordures, à Asrout, pour la réparation de la chaussée et autres travaux de maintenance, en passant par l'Erma, spécialisée dans l'électricité, pratiquement toutes les entreprises publiques concernées ont été mobilisées pour retaper toutes les routes qu'empruntera le président français. On mise particulièrement sur l'itinéraire du bain de foule prévu le long du boulevard menant de la Faculté d'Alger, legs de la France coloniale, jusqu'à la place Emir-Abdelkader. Un traitement particulier a été réservé à la bâtisse centenaire de la "Fac centrale" où M. Macron est spécialement attendu. L'établissement a subi, en effet, un badigeonnage, même de dernière minute, du jamais vu jusque-là. Pourtant, ce n'est pas la demande qui manquait auparavant. Une pétition signée par au minimum 500 universitaires a été adressée, il y a plus d'une année, aux autorités concernées, mais rien n'a été fait jusque-là. L'édifice a continué de tomber en ruine jusqu'à l'annonce de la visite de M. Macron. Même le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Tahar Hadjar s'est déplacé, dans la matinée d'hier, pour inspecter les travaux d'embellissement... de dernière minute : les coups de balai et de peinture se sont poursuivis durant toute la journée d'hier. "Nous étions informés de la pétition des universitaires, mais nous n'avons jamais vu de travaux engagés pour la restauration de la Fac centrale qui devait être la vitrine de notre capitale. Ce n'est qu'après l'annonce de la visite de Macron que des travaux d'embellissement ont été ordonnés", concède un conseiller du P/APC d'Alger, le tout fraîchement réélu, Abdelhakim Bettache. La Grande-Poste est l'autre édifice qui a bénéficié d'un coup de peinture blanche, de moindre qualité, elle, à l'occasion de cette visite. La rue Larbi-Ben-M'hidi — glorieux martyr de la Révolution — ex-rue d'Isly du temps de la France coloniale, représentant la grande partie de l'itinéraire de M. Macron, également blanchie, est quadrillée de bout en bout par des haies de sécurité. La chaussée et les trottoirs ont été retapés à la hâte, alors que les murs ont "subi" un coup de peinture blanche, comme pour se conformer au slogan creux d'Alger la blanche. Pour faire bonne impression au président français, les responsables des communaux et de la wilaya d'Alger ont redoublé d'efforts pour cacher toutes les facettes sombres de la capitale. Même les quelques chantiers, dont celui des travaux d'aménagement du sous-sol de la Grande-Poste, se dressant sur le passage de M. Macron, ont été dissimulés par de longs films décorés de sorte à ne pas agresser la vue de l'invité d'Alger. Cerise sur le gâteau, un écran géant diffusant en boucle les photos des plus beaux sites naturels du pays a été, par ailleurs, accroché à l'immeuble abritant jadis les Galeries d'Alger, sises entre la marie d'Alger-Centre et la place Emir-Abdelkader. Belle improvisation pour cacher les murs lugubres, tombant en ruine, de cet édifice laissé à l'abandon. Les rues non concernées par cette visite sont, bien sûr, carrément oubliées, y compris par les éboueurs, réquisitionnés. En effet, hormis l'itinéraire "bien maquillé" pour recevoir le président français, les ordures débordent dans quasiment tout le reste d'Alger... Farid Abdeladim