À l'occasion du 12e anniversaire de la disparition de l'Aménokal de l'Ahaggar, plusieurs conférences animées en fin de semaine par des historiens, ont permis de ressusciter la vie du principal garant de la stabilité dans le grand Sud algérien, et ce, avant, pendant et après la Révolution. À l'initiative de l'association Michaâl Echahid et la wilaya de Tamanrasset, un vibrant hommage a été rendu, en fin de semaine, à l'Aménokal de l'Ahaggar, le défunt Hadj Moussa Ag Akhamok, à l'occasion du 12e anniversaire de sa disparition, coïncidant avec le 28 décembre de chaque année. Un riche programme d'activités a été ainsi mis sur pied par les organisateurs qui ont fait appel aux historiens, en l'occurrence Dr Mohamed Lahcen Zeghidi et Ramadane Hadji, pour retracer le parcours du défunt et revenir sur les évènements marquant la vie de cette figure emblématique dans la société touareg. En présence du wali, Djilali Doumi, la famille révolutionnaire et les autorités civiles et militaires, les conférences animées au siège de l'APC d'Abalessa, à 80 km du chef-lieu de wilaya, ont permis de ressusciter la vie du principal garant de la stabilité dans le grand Sud algérien, et ce, avant, pendant et après la Révolution. Considéré parmi les piliers de la guerre de Libération nationale dans ce vaste territoire saharien, Moussa avait, pour mémoire, supervisé dès 1956, des opérations de distribution d'armes en provenance de la Libye. Il a aussi assuré la diffusion du courrier émanant des commandements du nord du pays. De par sa connaissance du terrain, il est considéré comme conseiller et un guide irréprochable dans le front du Sud. L'auteur de la célèbre citation : "Je suis Algérien et je le resterai que l'Algérie soit indépendante ou non", en réponse à la proposition de général de Gaulle, en 1961, quand la proclamation de l'autonomie du Sahara, a été ainsi d'une grande modestie en dépit de sa place prestigieuse au sein des Imuhagh. Moussa a de par son embonpoint et son caractère imbu d'autorité, marqué l'histoire de l'Ahaggar et une ère de bonne gouvernance, témoignent les historiens. Neveu de la plus grande joueuse d'Imzad, Dassine, qu'il est, est né en 1921 près de la localité d'Izarnen, à 20 km de Tamanrasset. Une année qui coïncida avec la mort du vaillant guerrier de la région, Moussa Ag Amestan et la proclamation d'Akhamouk comme Aménokal de l'Ahaggar. Issue d'une famille riche et noble de la tribu de Kel Ghela, Moussa fut scolarisé d'abord dans une école coranique à Tifert (80 km de Tamanrasset) puis dans une école publique. Il fut élu premier président de l'APC de Tamanrasset en 1963. En 1975, il succéda à son frère, Bey Akhamouk, Aménokal des Touareg de l'Ahaggar. Moussa a, par contre, toujours refusé le titre de l'Aménokal comme il l'avait toujours signifié de son vivant. "Je ne suis pas Aménokal, ce temps est révolu." La visite du président Houari Boumediene à Tamanrasset, le 21 mars 1977 a été un point fort au règne de Moussa. Quand le président avait évoqué la destruction de la vieille église de Tamanrasset et El Hadj, l'héritier des Akhamouks lui a répondu humblement : "Nos terres suffisent pour bâtir mille mosquées, alors pourquoi détruire l'histoire." Durant sa vie, il a toujours été le garant de la stabilité de la région notamment après l'éclatement du conflit de l'Azaouad. Moussa Ag Ihema a, de tout temps, œuvré pour la préservation de la virginité de l'Ahaggar et son aspect sauvage. Tout comme il a conservé le patrimoine culturel matériel et immatériel des Touareg en plaidant pour une activité touristique en harmonie avec la nature. Il a lutté pendant des décennies pour le développement, l'épanouissement et la bonne éducation de la nouvelle génération touareg. Son intervention auprès des hautes autorités du pays pour la scolarisation des enfants issus de familles nomades fut historique, rappelle M. Hadji. Il a marqué l'histoire nationale par son charisme en tant que chef spirituel des Touareg et non pas en tant Aménokal. Il faut savoir que Moussa disait toujours que le dernier Aménokal de l'Ahaggar était son grand frère Hadj Bey Akhamouk, en témoigne sa déclaration au journal Le Matin (édition n°290 des 23 et 24 octobre 1992). "Quand il a reçu Bouteflika dans sa maison au lendemain de son élection à la magistrature suprême de la République, en 1999, il s'est présenté d'ailleurs en qualité du président d'honneur de l'association des amis de l'hôtel Safir", relate son petit-fils Elias. De 1975 à 1991, il a siégé dans son habit traditionnel à l'APN. De 1992 à 1997, il était désigné membre du Conseil national, puis membre du Sénat de 2003 à 2005. L'évènement qui l'avait marqué était le décès de son fils Bey, car il voyait en lui le successeur légitime de par sa sagesse et son niveau d'instruction. Le 28 décembre 2005, Moussa Akhamouk rejoint son fils des suites d'une brève maladie, à l'âge de 84 ans. "Il a poussé ses derniers souffles dans mes bras, sans rien dire. Je voulais l'entendre dire quelque chose. Mais il s'est tu à jamais, laissant le Hoggar orphelin et désemparé (...)", raconte Elias dans un témoignage percutant rapporté par l'écrivaine du livre dédié à Moussa, Malika Akhamouk. RABAH KARECHE