RESUME : Depuis cette nuit-là, la vie de Djamila a changé. Elle a conscience de ne pas bien faire même si Madjid parle de mariage. Elle craint le regard des autres et sait que leur relation est vouée à l'échec. Elle décide d'y mettre fin. Madjid n'est pas d'accord. -C'est la dernière fois qu'on se voit, dit Djamila. Dans notre intérêt… - Mais où est notre intérêt ? En mettant fin à notre bonheur ? Je m'expose aux pires des souffrances, je ne pourrais jamais vivre sans toi. Madjid n'est pas prêt de renoncer à elle. Il l'aime et il sait qu'elle éprouve des sentiments pour lui. S'il n'y avait pas leur différence d'âge, l'impitoyable regard de la société et la crainte de froisser ses enfants, elle n'hésiterait pas à accepter. - Je t'en pries , lui dit-elle. C'est déjà assez difficile. Pourquoi compliquer les choses ? On n'est pas faits pour être ensemble. Je suis trop vieille pour toi. Quand toi tu auras cinquante ans, moi j'en aurai plus de soixante-dix. Que peux-tu espérer vivre et partager avec moi ? Le temps est contre nous. Mais Madjid semble sourd. Il n'entend que son cœur qui bat d'amour pour elle. Il n'allait pas abandonner. Leur amour sera plus fort que tout. Lui en est certain. Si elle se donnait la peine de résister ou même de se battre pour leur amour, rien ne pourra les séparer. - Rien n'est contre nous, rétorque-t-il. Si nous sommes forts, rien ni personne ne pourra nous séparer. La prochaine fois que tes enfants viendront, je leur parlerai. - Non, non, s'écrie-t-elle, pas tout de suite. - Quand ? demande-t-il. - Dès que je serai prête. - Tu me le promets ? - Oui, c'est promis, lui dit-elle. Dès que je me sentirai assez forte, je le ferai moi-même. Madjid veut bien être patient avec elle. Mais lui, de son côté, décide de prendre les choses en main. Quand il rentre chez lui, il parle à sa famille de son projet de se marier. Tous approuvent son intention et veulent en savoir plus sur la femme avec qui il voudrait se marier. Tous croient que c'est une jeune fille et ils veulent entreprendre les démarches. - D'où est sa famille ? Connais-tu ses parents ? Où pouvons-nous les joindre ? - Elle a perdu ses parents et elle n'a pas de frères, leur apprend Madjid. Elle a juste une sœur. - Comment l'as-tu connue ? demande sa mère Fatima. - Au cabinet où elle travaille, répond Madjid. Elle est infirmière. Comme toutes les mères, Fatima veut en savoir plus. - Une infirmière, c'est donc qu'elle est instruite. Elle sort. Comment est-elle ? Quel âge a-t-elle ? - Elle est belle, lui dit Madjid. Elle est pleine de qualités. Elle est adorable. - Tu ne m'as pas dit quel âge elle a, insiste sa mère. Elle est plus jeune que toi de combien ? - Je ne suis pas de son âge, répond Madjid qui hésite à dire que Djamila est, en fait, plus âgée que lui. On n'est pas d'une même génération. - Ne me dis pas qu'elle va encore à l'école, s'écrie sa mère. Est-elle mineure ? - Non, tout proche de la retraite, lâche Madjid. Il peut voir les visages de sa famille s'allonger. Un silence de plomb règne dans le salon. Sa mère ne veut pas y croire. Elle lui demande, d'une petite voix, presque tremblante : - Dis, tu plaisantes ? Madjid ne répond pas. Il hoche seulement la tête et ferme les yeux quand il voit sa mère se prendre la tête dans les mains, comme si un malheur était arrivé. (À suivre) A. K. [email protected]