"Les nouvelles mesures risquent d'aggraver les déséquilibres, d'accentuer les tensions inflationnistes et d'accélérer la perte des réserves de change", avertit le Fonds. Le Fonds monétaire international (FMI) est très critique sur la politique économique, à court terme, menée actuellement par le gouvernement algérien. Si le FMI partage le double objectif des autorités algériennes de stabiliser l'économie et promouvoir une croissance plus durable et plus inclusive, il considère que "le nouveau dosage de politique économique à court terme est risqué et pourrait entraver la réalisation de ces objectifs". C'est ce qu'a indiqué, hier, Jean-François Dauphin, chef de mission du FMI, lors d'une conférence de presse organisée à l'hôtel El-Djazaïr. Plus grave encore, la mission du FMI, qui a séjourné à Alger du 27 février au 12 mars derniers, dans le cadre des consultations au titre de l'article IV du Fonds, avertit que "les nouvelles mesures risquent d'aggraver les déséquilibres, d'accentuer les tensions inflationnistes et d'accélérer la perte des réserves de change". Le FMI estime qu'"il se peut que l'environnement économique ne devienne propice ni aux réformes ni au développement du secteur privé". La mission du FMI est d'avis que l'Algérie a toujours une fenêtre d'opportunité pour concilier ajustement économique et croissance. "Avec une dette publique relativement basse et une dette extérieure faible, il est possible de renforcer les finances publiques graduellement", a indiqué Jean-François Dauphin, affichant sa réticence au recours au financement monétaire. "La consolidation budgétaire est nécessaire pour ajuster le niveau des dépenses au niveau réduit des recettes, mais elle peut se faire à un rythme régulier sans recourir au financement monétaire de la Banque centrale", estime le chef de la mission du FMI. "L'expérience internationale nous montre que le financement monétaire est très souvent source d'inflation", a-t-il argué. Jean-François Dauphin suggère, plutôt, l'utilisation d'autres instruments de financement, notamment "l'émission de titres de dette publique au taux du marché, des partenariats publics-privés, des ventes d'actifs et, idéalement, d'emprunts extérieurs pour financer des projets d'investissements bien choisis". Si le choix est fait de continuer de monétiser le déficit, le chef de la mission du FMI estime qu'il faudrait "mettre en place des sauvegardes robustes, notamment en plafonnant strictement le financement monétaire en volume et en durée, tout en lui appliquant un taux de marché". Pour Jean-François Dauphin, la consolidation budgétaire devrait être menée, d'une part, en augmentant les recettes non pétrolières à travers l'élargissement de l'assiette fiscale (réduction des exonérations et renforcement du recouvrement) et, d'autre part, en réduisant graduellement le poids des dépenses courantes dans le PIB et les investissements, tout en améliorant leur efficacité. Jean-François Dauphin a, également, estimé qu'une dépréciation progressive du taux de change combinée à des efforts visant à éliminer le marché parallèle des changes favoriserait aussi l'ajustement. Pour autant, quel que soit le dosage de la politique économique appliqué par le gouvernement algérien, "une masse critique de réformes structurelles est nécessaire pour promouvoir l'émergence d'une économie tirée par le secteur privé et diversifiée, et réduire ainsi la dépendance au pétrole et au gaz", a plaidé le responsable du FMI. Selon lui, "il convient d'agir sans tarder sur plusieurs fronts pour simplifier la bureaucratie, améliorer l'accès au crédit, renforcer la gouvernance, la transparence et la concurrence, ouvrir davantage l'économie à l'investissement étranger, améliorer le fonctionnement du marché du travail et l'adéquation entre les emplois et les compétences, et favoriser l'emploi des femmes". Jean-François Dauphin a aussi plaidé pour l'assouplissement de la règle 51/49, estimant que l'Algérie aurait pu drainer plus d'investissements directs étrangers sans cette règle. Concernant la politique commerciale, le responsable du FMI soutient qu'elle doit avoir pour objectif principal d'encourager les exportations plutôt que d'imposer des barrières non tarifaires aux importations, barrières qui créent des distorsions. Meziane Rabhi