Pris au piège d'une logique destructrice, le Proche-Orient égrène ses morts comme le temps ses ratés. Et le temps dans cette partie du monde est une prison. Il tient enfermé dans ses segments le devenir de tout un peuple voué à l'errance dans un espace clos, érigé en bantoustan. La terreur appelle la terreur. Déracinés, ghettoïsés, réprimés, les Palestiniens n'ont d'autre choix que de recourir aux méthodes de leur oppresseur pour se libérer du destin fatal. Dimanche soir, au moins dix-huit Israéliens ont été tués et une centaine d'autres blessés dans un double attentat à Jérusalem. Revendiquée par les mouvements Hamas et le Djihad islamique, cette tuerie est la vingt-septième en moins d'une année. Aussitôt, Tel-Aviv a enclenché sa machine répressive pour venger ses morts et faire savoir aux Palestiniens que leurs actions sont vaines. Le fait n'est pas nouveau. En mouvement permanent, les chars de l'armée israélienne finiront un jour par ne plus lever leur siège autour des camps de réfugiés. Prônant la politique de la carotte et du bâton, le Premier ministre Ariel Sharon, actuellement préoccupé par les prochaines échéances électorales, se veut l'homme du consensus en valsant maladroitement sur les contradictions. D'un côté, il se lance en guerre à nouveau contre les Palestiniens, de l'autre, il leur propose la paix. C'est du moins ce qui ressort de sa déclaration dimanche. Avec cette nouvelle offre de dialogue peu crédible, le chef du Likoud veut surtout et d'abord faire de l'ombre à son rival aux législatives, le représentant de la gauche, Amram Mitzna. Autrement plus engagé dans le processus de paix, celui-ci a promis le partage de Jérusalem ainsi que le droit au retour à 3,5 millions de Palestiniens. Tiendra-t-il ses engagements si par chance il parvenait au pouvoir ? En tout cas, Sharon a pour sa part tout intérêt à renforcer sa stratégie électorale. Discrédité par une politique palestinienne infructueuse et l'implication de ses fils dans une affaire de corruption, sa cote de popularité a pris un sérieux coup. Extra-muros, ses alliés semblent également ne plus supporter ses humeurs. Cependant, quand même Sharon est un jusqu'au-boutiste, un boucher, son remplacement va-t-il réellement concourir à la solution du conflit au Proche-Orient ? Rien n'est du ressort d'un seul individu et tout est une question d'hommes. S. L.