Depuis 2003, cinq walis se sont succédé sur ce dossier. Les chalets, considérés par le Premier ministre Ouyahia en 2006 comme des logis précaires mais transitoires pour "une période ne devant pas dépasser 18 mois", sont toujours présents à Boumerdès, quinze après. "C'est un lourd fardeau, très mal pris en charge au départ, il bloque tout développement", lance un haut responsable local. Enchaînant, il avoue que "les sites se bidonvillisent et où se côtoient tous les maux de la société". Sur ces lieux souffrant d'absence de sécurité, de propagation de maladies (des milliers de cas d'asthme, de pédiculose) et d'un manque flagrant de commodités de vie, est venu se greffer un phénomène en nette expansion, à savoir l'apparition de nouvelles constructions précaires au vu et au su d'une administration parfois complice. Au début du mois, une prise de bec entre le wali et une citoyenne a créé le buzz sur les réseaux sociaux lors d'une opération touchant 390 familles occupant des chalets dans la commune de Boumerdès. Ceci démontre encore une fois la fragilité des pouvoirs publics à gérer ce dossier. Ne dérogeant pas à la règle, chaque distribution de logements connaît son lot de contestations, frisant parfois l'émeute. Le logement est devenu un sérieux cas d'ordre public. Il y a une semaine à Bordj Menaiel, le relogement de 800 familles, sur une opération d'envergure de 2080 logements touchant plusieurs communes, s'est faite en présence d'un service d'ordre exceptionnel : gendarmes et policiers encadraient la ville et les axes importants afin de parer à tout dérapage. À Thenia, ville qui n'arrive pas à panser ses plaies et dont les stigmates du séisme du 21 mai sont toujours visibles, plus de 600 familles disséminées à travers cinq sites (Bournane 1et 2, Bergouga, Louz et Sghirate) viennent encore une fois d'interpeller les autorités locales sur leur devenir. "Ma fille est née en 2003, elle a connu la tente, puis le chalet. Asthmatique, elle va passer son brevet. Est-ce que ce sont les conditions pour préparer un examen ?", se demande Djamel, et d'ajouter : "Mon aîné ‘'s'est exilé'' chez ses grands-parents. On ne pouvait vivre tous dans un 36 m2, de surcroît vétuste", concluant que "le logement pour nous n'a plus de goût". À l'extrême est de la wilaya, il y a une semaine, les citoyens occupant des chalets à Ouled Aïssa ont fermé le siège de la daïra de Naciria, revendiquant le droit à un logement décent. "Devant les promesses non tenues par les élus locaux et se sentant exclus des futures opérations, il ne restait que la rue pour crier haut nos revendications", lance un des représentants de la soixantaine de familles qui occupent des chalets dans cette commune rurale. Si le logement est synonyme d'un toit sécurisant pour le père de famille, pour certains c'est un marché juteux, héritant de l'opacité et de l'anarchie nées au lendemain de la distribution de chalets en 2004 grâce "au bon vouloir" des élus et de certains cadres de l'administration. Il est difficile aujourd'hui de distinguer le vrai du faux bénéficiaire. Depuis 2003, cinq walis se sont succédé sur le "dossier-chalet", des dates pour en finir sont lancées à la veille de chaque événement mais vite reportées, les autorités locales avaient avancé la fin décembre 2017 comme date butoir pour en finir. Mais un autre son de cloche retentit après la distribution de 800 logements de Bordj Menaiel pour fixer le 5 juillet prochain comme date bilan de l'éradication de 11 000 chalets, soit 75% des 14 500 installés sur 96 sites. Wahab M.