Déplorant le retard enregistré en matière de développement des énergies renouvelables en Algérie, Abdelmadjid Attar a jugé "inéluctable" le recours à l'exploitation du gaz de schiste. Abdelmadjid Attar, l'ancien P-DG de Sonatrach de 1997 à 2000, a estimé, hier à Tizi Ouzou, qu'il était urgent pour l'Algérie de sortir du modèle énergétique actuel pour pouvoir faire face aux défis auxquels elle sera confrontée au-delà de 2030. "La sécurité énergétique de l'Algérie au-delà de 2030 passe par la mutation de son modèle de consommation énergétique vers un niveau de plus en plus basé sur d'importants efforts d'économie d'énergie, et le recours aux énergies renouvelables", a prévenu M. Attar, qui animait, hier, à l'université de Tizi Ouzou, une conférence-débat sous le thème "La sécurité énergétique et la transition énergétique : les défis à l'horizon 2030". Il estime que le risque prévisible en matière de sécurité énergétique vient du fait que l'Algérie fait et fera face beaucoup plus à un défi de rente pétro-financière au-delà si elle n'est pas remplacée par d'autres richesses à cet horizon. Le programme de transition énergétique est, à ce titre, "plus que stratégique", a assuré le consultant international, non sans préciser que ce programme doit comporter, en plus des 22 000 mégawats annoncés, un programme encore plus audacieux en matière d'économie d'énergie. "Avec ce que nous avons aujourd'hui, on pourra exporter des hydrocarbures jusqu'en 2035-2040, mais si on n'introduit pas les énergies renouvelables, qu'on n'élabore pas un programme d'efficacité énergétique et qu'on ne découvre pas de nouveaux gisements, au-delà de cette échéance nous ne pourrons plus exporter un seul mètre cube de gaz", a-t-il encore prévenu. Pour lui, la grande incertitude aussi bien sur les réserves d'hydrocarbures conventionnels récupérables restantes après l'épuisement déjà de plus de 50% des ressources en 50 ans, que sur les possibilités de découvertes, d'un côté, et le rythme de croissance de la consommation énergétique interne qui s'est multipliée de 235% de 2000 à 2017, et qui va encore réduire de façon importante et rapide la rente pétrolière dont dépend actuellement l'économie algérienne, d'un autre côté, ne permettront plus de bâtir dessus une stratégie de développement économique. S'appuyant sur des chiffres qu'il a présentés comme étant les plus fiables, il a estimé que "malgré les prévisions d'une économie de 300 milliards de mètres cubes de gaz naturel et 93 millions de Tep en hydrocarbures liquides prévue à l'horizon 2030, nous aurons alors quand même consommé à cet horizon quelque chose comme 700 à 800 milliards de mètres cubes de gaz naturel, soit l'équivalent de toutes les réserves restantes de Hassi-R'mel, qui constitue 70% des réserves algériennes en gaz, plus un ou deux autres gisements de gaz naturel". Déplorant le retard enregistré en matière de développement des énergies renouvelables en Algérie qui a annoncé en 2011 un ambitieux programme de 22 000 MW à l'horizon 2030 mais qui ne produit que 354 MW jusque-là, M. Attar a jugé "inéluctable" le recours à l'exploitation du gaz de schiste dont l'Algérie détient des réserves estimées à 22 000 milliards de mètres cubes. "Le gaz de schiste ne peut être exploité actuellement en raison de ses coûts élevés, mais quand on aura certainement besoin de ce gaz non conventionnel au-delà de 2030, on peut aussi supposer que les progrès technologiques très rapides en ce moment, pourront assurer non seulement la rentabilité de ce type de ressource énergétique, mais aussi de faire face aux risques environnementaux, qui sont du reste identiques à tous ceux liés à l'exploitation des hydrocarbures conventionnels", a-t-il analysé en plaidant, toutefois, pour un passage progressif à un modèle de consommation mixte, non renouvelable et renouvelable et un soutien aux investissements publics ou privés destinés à assurer cette transition qui n'est pas, dit-il, seulement énergétique mais aussi économique. Samir LESLOUS