Après une dizaine de jours de projections, d'émotions, de discussions et de spéculations, le Festival de Cannes a baissé le rideau avec une cérémonie de distribution des prix, teintée surtout d'humour italien dont Roberto Benigni a arrosé la salle. Tandis que Jean-Luc Godard reçoit une Palme d'or spéciale, Spike Lee repart avec le Grand prix. Le jury paritaire présidé par Cate Blanchett a mis fin au suspense et aux spéculations en attribuant la Palme d'or au film du Japonais Hirokazu Kore-Eda, Une affaire de famille. Ainsi, après le Prix du jury en 2013 avec Tel père, tel fils, il devient le 5e Japonais à remporter le prix le plus convoité au monde. Cette année, le jury a créé la surprise en donnant une Palme d'or spéciale à Jean-Luc Godard pour Le livre d'image. La présidente justifie cela par la volonté de distinguer un artiste qui fait avancer le cinéma, qui a repoussé les limites et qui cherche sans arrêt à définir et redéfinir le cinéma. L'année passée, le réalisateur suisse a partagé son prix avec le Canadien Xavier Dolan, mais cette année son dernier film Livre d'image a été récompensé par une attention particulière. Spike Lee, de son côté, n'est pas reparti bredouille, puisque le jury lui a attribué le Grand prix pour son film Blackkklansman qui met en scène l'infiltration d'un gang du Ku Klux Klan par un policier noir, durant les années 1970. C'est surtout un film qui met en évidence les dangers des manichéismes idéologiques haineux qui menacent l'Amérique. "Mon film est une alarme pour l'Amérique", a-t-il dit dans sa conférence de presse, à Cannes. Lors des deux derniers jours du Festival de Cannes, la presse et les festivaliers ont donné libre cours à leur imagination et donnaient la Libanaise Nadine Labaki comme vainqueur incontournable de la Palme. Les adeptes de cette conjecture s'appuyaient, entre autres, sur le féminisme de la présidente Cate Blanchett. Mais au final, ils doivent être déçus, puisque la réalisatrice de Capharnaüm n'est repartie qu'avec le Prix du jury. À son tour, le réalisateur iranien Jafar Panahi qui a présenté 3 Visages n'a pas été oublié, mais il a dû partager le Prix du meilleur scénario (ex aequo) avec l'Italienne Alice Rohrwacher pour Lazzaro Felice. Enfin, alors que le Prix de la mise en scène est revenu au Polonais Pawel Pawlikowski pour Zimna Wojna, la Caméra d'or a été attribuée au Belge Lukas Dhont pour Girl qui a raflé par ailleurs 3 prix. Même si le palmarès 2018 ne répond pas nécessairement aux attentes des uns et des autres, force est de constater que le jury a livré un palmarès mesuré et équilibré. Parmi les grands oubliés, on retrouve Yomeddine, de L'Egyptien AB Shawky et Le poirier sauvage, du Turc Nuri Bilge Ceylan. De Cannes : Tahar Houchi