Des sources concordantes ont confirmé à Liberté la radiation du corps de la magistrature de cinq juges pour fautes professionnelles et conduite en état d'ivresse et de deux autres pour leur implication présumée dans des affaires de corruption liées à l'importateur et promoteur immobilier Kamel Chikhi, connu communément sous le sobriquet référent à son métier d'origine "le boucher". Le Conseil supérieur de la magistrature, qui s'est réuni en session disciplinaire ordinaire la semaine dernière, a décidé de révoquer le procureur de la République près le tribunal de Boudouaou et de son adjoint, placés sous mandat de dépôt, il y a près d'un mois. Est-il admis que des magistrats, certes poursuivis dans des actions en justice, sans être encore condamnés, soient ainsi radiés ? "Ils tombent sous le coup d'une procédure disciplinaire qu'il faut dissocier de la procédure judiciaire", nous explique-t-on. Notre interlocuteur, proche des milieux de la magistrature, dément, toutefois, l'information relative à la radiation, dans les mêmes formes et pour les mêmes motifs, de l'épouse du procureur de la République près le tribunal de Boudouaou, qui siège à la chambre des affaires du foncier au tribunal d'Alger. "Elle n'est pas citée dans cette affaire. Des journalistes l'ont vue sortir du tribunal au moment de l'audience de son mari, ils ont conclu qu'elle aussi était impliquée", affirme-t-il. Le CSM examinera ultérieurement les cas des autres magistrats, dûment cités dans des enquêtes liées à l'affaire de la cocaïne, ajoutent nos sources. Vingt-huit magistrats, dont deux sont déjà placés sous contrôle judiciaire, seraient mis en cause, à tort ou à raison, dans un vaste trafic d'influence, abus de fonction et de corruption à l'avantage de Kamel Chikhi. L'homme d'affaires, dont l'empire s'est écroulé comme un château de cartes à la faveur d'une saisie impromptue de quantités importantes de cocaïne, a emporté dans sa chute de hauts responsables de l'Etat et de l'administration locale et centrale. Il a surtout provoqué un véritable séisme dans les arcanes de la justice. Que la corruption, qui gangrène ce secteur sensible soit aussi apparente, déconcerte l'opinion publique. Pourtant, ce n'est pas la première fois que les sessions disciplinaires du Conseil supérieur de la magistrature aboutissent à des décisions de radiation de magistrats, rendus coupables de violation de l'obligation de réserve, parti pris intentionnel au profit de l'un des justiciables, négligence dans le traitement des affaires en justice, ou carrément poursuivis pénalement pour corruption. Souhila H.