Le deuxième gala organisé par Slimane Azem en 1974, à la salle de la Mutualité à Paris, fut aussi une autre victoire pour "Agraw Imazighen" même si l'Amicale des Algériens en France qui représentait le pouvoir algérien avait tout fait pour saboter un tel évènement. Dans le cadre de la célébration du centenaire de la naissance de l'illustre chanteur kabyle, le regretté Slimane Azem, le professeur Hend Sadi, animateur bien connu du Mouvement culturel berbère, mathématicien et éminent chercheur, a animé, samedi dernier, une conférence débat autour de "l'apport de l'Académie berbère dans la lutte identitaire", au siège du comité de village d'Agouni Gueghrane. Devant une assistance nombreuse, le conférencier témoignera de l'appui du regretté Slimane Azem à l'Académie berbère, créée par Mohand Arab Bessaoud après la défaite du FFS, et reprochait aux cadres du parti de ne pas avoir assumé la question culturelle et identitaire amazighe. Cependant, a signalé le conférencier, cet ex-officier de l'ALN et membre fondateur du FFS a conclu qu'il fallait agir autrement. L'intervenant reviendra ensuite sur la création de l'Académie berbère (Agraw Imazighen) depuis la première réunion tenue le 14 juin 1966 à Paris en présence des militants Taos Amrouche, Mohand Arab Bessaoud, Abdelkader Rahmani qui fut, d'ailleurs, le premier président de cette association en août 1966, de Mohamed Amokrane Khelifati et bien d'autres militants réunis au domicile de Taos Amrouche à Paris. "C'était Mohamed Amokrane Khelifati qui créa "agmay" (alphabet amazigh) en tifinagh", a-t-il précisé. C'est pour vous dire, a-t-il poursuivi, que Mohand Arab Bessaoud n'a pas créé seul cette académie. Seulement, il a noté que celui-ci avait une grande stratégie dans la poursuite de cette grande œuvre. "Il créa la revue Imazighen distribuée même en Algérie à l'époque et réussit ainsi à conquérir le milieu ouvrier parce que c'était très important", a-t-il jugé. Hend Sadi portera aussi à la connaissance de la nombreuse assistance que le regretté Slimane Azem avait appuyé ce mouvement en organisant un gala artistique le 8 juin 1969 auquel avaient participé Akli Yahiatène, Oukil Amar, Salah Saâdaoui, Mohamed Saïdji et bien d'autres artistes kabyles, le gala ayant été animé par l'illustre Hamid de Radio-Paris en langue kabyle. "C'était un franc succès. Je peux dire que c'était le tournant décisif et la naissance officielle de l'Académie berbère", a-t-il estimé. Pour l'orateur, le deuxième gala organisé par Slimane Azem en 1974, à la salle de la Mutualité à Paris, fut aussi une autre victoire pour "Agraw Imazighen" même si l'Amicale des Algériens en France qui représentait le pouvoir algérien avait tout fait pour saboter un tel évènement. "Il a eu un apport financier important pour l'Académie berbère parce que l'argent était versé directement à l'association. Ensuite, de nombreux Kabyles ont découvert ce mouvement et c'est à partir de là que l'adhésion des militants de la cause berbère était devenue massive", a-t-il relaté. Le conférencier a aussi souligné l'impact de la création de l'Académie berbère en Algérie notamment en Kabylie où deux événements ébranlèrent le régime de Boumediène : la grande manifestation de Larbâa Nath Irathen en 1974 et la réaction du public sportif lors de la finale de la Coupe d'Algérie en 1977 entre la JSK et le NAHD quand le président de la République fut hué. "Il y eut aussi la création du Groupe d'études berbères de Vincennes par des étudiants en 1972 dont M'barek Redjala fut aussi d'un apport considérable pour cette noble cause, notamment au sein des milieux estudiantins dominés dans les années 70 par les militants communistes", a-t-il ajouté. D'ailleurs, a-t-il rappelé à l'assistance, ce sont les mots d'ordre de ce mouvement qui ont été mis en avant en avril 1980. "Je dois aussi dire que le choix des caractères en tifinagh du défunt Mohand Arab Bessaoud était stratégique. C'est pour s'affirmer devant les autres qu'Imazighen avaient un système d'écriture bien avant les autres." Hend Sadi a conclu que l'Académie berbère a énormément contribué pour la promotion et la défense de la cause amazighe. En 1978, ce fut la fin de l'Académie berbère parce que, selon le conférencier, l'usage de la force pour exiger de l'argent aux militants était fatal, et Mohand Arab Bessaoud fut arrêté par la police française après qu'il eut été dénoncé par un militant. "Si, aujourd'hui, on vous dit que c'est Bouteflika qui a officialisé tamazight, je vous dirai que c'est archifaux. C'est tout simplement de la manipulation politique. Ce sont Slimane Azem, Mohand Arab Bessaoud et des milliers de militants qui ont su, avec leur combat, réhabiliter tamazight dans son pays où elle constitue le socle de l'identité algérienne en particulier et maghrébine en général", a-t-il martelé. O. Ghilès