La contestation sociale en Tunisie ne faiblit pas face à l'incapacité du gouvernement de Youssef Chahed à redémarrer une machine économique en panne. Des centaines de Tunisiens ont organisé mardi soir un rassemblement de protestation contre la cherté de la vie à Tunis, ont rapporté hier les médias locaux, alors que des heurts ont marqué un rassemblement des habitants de Kasserine où un jeune journaliste est mort après s'être immolé par le feu lundi. Les manifestants ont scandé des slogans dénonçant la marginalisation dont sont victimes les régions de l'intérieur du pays. "Le peuple en a marre des nouveaux Trabelsi", en référence à la famille de l'épouse de l'ancien président déchu Zine Al-Abidine Ben Ali, et "Le peuple veut la chute du régime", ont scandé les manifestants qui ont brandi des pancartes sur lesquelles on pouvait lire «Stop à la hogra" (marginalisation). Dans la même soirée de mardi à hier, des heurts ont opposé des manifestants aux forces de l'ordre à Kasserine (centre-ouest du pays), frontalier avec l'Algérie, après le décès d'un journaliste local qui s'est immolé lundi par le feu, lit-on dans la presse locale. Le journaliste-caméraman, Abderrazak Rezgui, avait mis fin à ses jours en s'immolant par le feu en plein "place des Martyrs" de la province de Kasserine. "Pour les habitants de Kasserine qui n'ont pas de moyens de subsistance, aujourd'hui, je vais commencer une révolution, je vais m'immoler par le feu", a déclaré le journaliste dans une vidéo qu'il a publiée 20 minutes avant de passer à l'acte. Ce drame a provoqué l'émoi à travers tout le pays et rappelé la réalité d'une Tunisie qui a du mal à se défaire des démons de l'ancienne dictature. Ce pourquoi les journalistes, à travers leur syndicat, ont décidé d'observer une grève générale le 14 janvier prochain, en signe de protestation contre la situation socioéconomique qui a poussé leur collègue au suicide. "Avec l'approche de la célébration du 8e anniversaire de la révolution de la liberté et de la dignité, les journalistes tunisiens souffrent encore de difficultés majeures sur le double plan social et financier", s'est exprimé le bureau exécutif du SNJT. "Bien que la liberté d'expression se veut l'une des acquis post-révolution, cet atout est menacé par la corruption, la marginalisation et la violation de l'éthique journalistique", a ajouté le SNJT dans un communiqué. À la veille d'une présidentielle charnière, les ingrédients d'une nouvelle explosion sociale en Tunisie sont réunis. D'ailleurs, les habitants de Kairouan, dans le sud-est du pays, ont appelé à une marche pour aujourd'hui, en signe de protestation contre la détérioration de leur situation socioéconomique. Réunis autour de plusieurs organisations de la société civile, les citoyens de cette ville comptent organiser une marche pacifique et un sit-in devant le siège du gouvernorat local pour dénoncer "la détérioration de la situation socioéconomique de la région et la non-activation des décisions du chef du gouvernement Youssef Chahed, relatives à la mise en place de plusieurs projets au profit de la capitale des Aghlabides", a rapporté la radio Mosaïque FM. Lyès Menacer