L'Algérie et la Tunisie ont maintes fois rejeté l'implantation de ces centres de rétention sur leur sol et en Libye, estimant que la crise migratoire doit être traitée en amont, dans les pays pourvoyeurs en migrants et réfugiés. Une nouvelle alerte, émanant de l'ONG Médecins sans frontières (MSF), a été lancée jeudi pour mettre fin à la souffrance des migrants, des réfugiés et des demandeurs d'asile renvoyés de force sur le sol libyen, après leur arrestation en mer Méditerranée par les marines des Etats membres de l'Union européenne ou les gardes-côtes libyens. S'appuyant sur des données collectées ces deux dernières semaines, l'ONG française a fait état d'une nette augmentation du nombre de personnes dans les centres de détention de Misrata et Khoms, soulignant que "la population dans les centres de détention de la zone a augmenté de 650 au début de l'année à 930 aujourd'hui". Selon MSF "le 21 janvier 2019, 106 migrants et réfugiés ont été débarqués d'un navire commercial à Khoms. Des informations non encore confirmées feraient état d'au moins 6 personnes noyées alors que le groupe était en mer", lit-on sur le site de l'ONG qui dénonce ce qu'elle qualifie de "violation du droit international". Emboîtant le pas à d'autres ONG indépendantes et aux organisations onusiennes, comme le HCR, MSF affirme, par la voix de Julien Raickman, son chargé des opérations à Misrata, Khoms et Beni Walid, à l'est de la capitale Tripoli, que "lors du débarquement, plusieurs personnes nécessitaient des soins médicaux d'urgence et nous sommes intervenus pour fournir une assistance médicale sur place". L'organisation non gouvernementale a référé 10 individus pour des soins en milieu hospitalier. Malgré cela, un garçon de 15 ans est mort après son arrivée à l'hôpital. Mercredi, un autre groupe de 144 personnes, également secourues par un navire marchand, a été ramené à Misrata. Et de préciser que "des femmes, dont certaines enceintes, des bébés et des enfants de moins de 7 ans figuraient parmi les 250 personnes débarquées à Misrata et Khoms. Elles ont été transférées dans des centres de détention de la région". MSF impute la responsabilité de cette situation catastrophique à la gestion répressive de la crise migratoire au niveau de l'Union européenne. La politique migratoire de l'UE est en grande partie responsable de l'aggravation de la crise migratoire, délocalisée par Bruxelles de la Méditerranée sur le sol libyen, en augmentant le nombre d'opérations de renvoi vers la Libye. "Quelques jours auparavant, 117 personnes se sont noyées lors d'un autre naufrage, démontrant clairement la politique délibérée de non-assistance à personnes en danger poursuivie par les autorités européennes en Méditerranée centrale", rappelle en effet MSF, ajoutant encore que "ces personnes récemment débarquées en Libye sont désormais enfermées dans des centres surpeuplés". Comme le constat du Haut-Commissariat des Nations unies aux réfugiés, MSF a constaté que les conditions de détention déjà difficiles sont aggravées par l'arrivée de nouveaux migrants. Les détenus n'ont quasiment pas accès aux espaces extérieurs. La nourriture est insuffisante et ne répond pas aux besoins nutritionnels des personnes gravement malades, des enfants et des femmes enceintes. Parmi les personnes récemment débarquées, certaines souffrent de malnutrition, d'hypothermie ou de diarrhée sévère. Lyès Menacer