Une région déshéritée, où la population a été marginalisée par les pouvoirs publics. S'il est vrai que dans tous les villages de la commune d'Aït Yahia Moussa (daïra de Draâ El-Mizan, wilaya de Tizi Ouzou) le projet de réseau de distribution de gaz naturel, lancé en 2013, est pratiquement achevé avec quelques petites réserves techniques émises ici et là, voilà que cette commodité se fait toujours désirer dans cette contrée rurale et déshéritée. D'ailleurs, même le wali de Tizi Ouzou, en visite au village de Hellil, le 11 décembre 2018, où il a inauguré une stèle dédiée aux martyrs de la bataille historique du 10 avril 1958, a été interpellé à ce sujet. Trois ans après l'arrêt regrettable des travaux et la résiliation du marché avec l'entreprise CBN, les travaux sur la conduite de transport de gaz allant du lieudit El-Mers (commune de Tizi Ghennif) et qui doit alimenter les villages de Sanana, Ichoukrène et Maâmar (commune de Draâ El-Mizan) ainsi que toute la commune d'Aït Yahia Moussa ont été finalement relancés. Ce projet a été confié à deux entreprises qui interviendront séparément à Draâ El-Mizan et Aït Yahia Moussa sur un tracé d'une dizaine de kilomètres. "Pour le moment, toutes les réserves ont été levées, les travaux sont en cours et l'on croit savoir que la mise en service du gaz naturel dans ces villages est prévue d'ici une année", nous a confié, au lendemain de l'installation du chantier, un adjoint au maire de Draâ El-Mizan. Pour ce qui est de la commune d'Aït Yahia Moussa, le P/APC nous a répondu qu'il y avait possibilité de raccorder provisoirement certains villages de sa commune, tels qu'Ath Rahmoune, Imzoughen et Tafoughalt, mais il paraît que des comités des villages limitrophes auraient décidé de s'opposer à cette éventualité. "Nous n'accepterons pas que des villages soient alimentés avant les autres, car les entreprises risquent de ne pas respecter les délais qui leur sont accordés. Du gaz pour tous, sinon rien, et nous n'avons pas omis de dire récemment au wali que nous avons été oubliés par la wilaya, car si les autorités parlent d'un taux de pénétration de plus de 85% dans la wilaya, dans notre commune il est de 0%", a souligné un citoyen de Tifaou. Pour l'heure, avec des températures qui descendent en dessous de zéro, les habitants de cette commune qui avoisine 26 000 habitants se débrouillent comme ils peuvent, soit au gaz butane qui n'est pas disponible dans tous les villages, ou au chauffage électrique qui revient cher, alors que la majorité des citoyens n'a d'autre moyen que d'aller chercher du bois mort dans les maquis avoisinants pour se chauffer tant bien que mal. C'est dire que l'hiver est sérieusement ressenti par la population de cette région montagneuse d'Aït Yahia-Moussa qui est, rappelons-le, la région natale de Krim Belkacem, l'un des héros de la révolution algérienne, lequel fit partie d'un noyau de vaillants combattants qui déclencha la guerre de libération nationale avec d'autres chefs révolutionnaires et qui eut l'insigne honneur de diriger la délégation du GPRA aux accords d'Evian pour donner naissance à l'Etat algérien, le 19 mars 1962. De plus, cette région glorieuse compte plus de huit cents martyrs tombés au champ d'honneur et voilà que, de nos jours, des milliers de ses citoyens transis de froid et marginalisés par les pouvoirs publics attendent encore l'arrivée du gaz naturel… en 2019 ! O. Ghilès