L'adhésion à la conférence projetée suppose un préalable : la légitimité de son initiateur, ce que le candidat Bouteflika aura du mal à obtenir, lui qui prétend à être reconduit sans s'impliquer dans sa propre campagne, ni par le discours et encore moins par l'engagement physique. Le directeur de campagne du candidat Abdelaziz Bouteflika, le chef de l'Etat sortant qui postule pour un 5e mandat d'affilée, ne lésine pas sur la promesse électorale. Il a déjà la faconde particulièrement débordante, alors qu'il reste encore près d'un mois et demi pour le démarrage officiel de la campagne électorale. Et s'il s'est mis à l'ouvrage sitôt sa lettre de mission reçue, c'est qu'il ressentait un impératif à agir de la sorte. L'idée du 5e mandat étant politiquement invendable et moralement insoutenable, il lui fallait faire du boucan de sorte que seules les voix des affidés se fassent entendre. C'est ainsi qu'il s'est empressé de faire la tournée des organisations de masse. Des escales qu'il a mises à profit pour s'adonner à une sorte d'explication de texte, puisque chez l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA), d'abord, et chez l'Union nationale des paysans algériens (UNPA), ensuite, il a évoqué la conférence nationale dite inclusive que Bouteflika a promis de réunir s'il est élu au soir du 18 avril prochain. Passe sur le fait que Sellal ait annoncé deux échéances pour la tenue de cette fameuse conférence, l'une ouverte jusqu'à la fin de l'année et l'autre plus précise située pour juste après le scrutin présidentiel, ce qu'il faut relever, c'est cette assurance à garantir la réussite du projet, alors que tout, vraiment tout, le condamne à l'échec. À commencer par les premiers concernés, les partis de l'opposition, qu'il sera difficile de convaincre d'être du conclave devant définir la nature des réformes à entreprendre et les amendements à apporter au texte constitutionnel. Le directeur de campagne de Bouteflika parle comme si rien ne pouvait contrarier cette perspective que le pouvoir se donne, faute de mieux. Une fausse assurance, il va sans dire, car Sellal ne peut pas ignorer que le projet ne se présente pas sous les meilleurs auspices, pour ne pas dire qu'il se trouve d'ores et déjà rejeté par les principaux partis de l'opposition. Notamment ceux qui dénoncent la candidature de Bouteflika pour un nouveau mandat. L'adhésion à la conférence projetée suppose un préalable : la légitimité de son initiateur, ce que le candidat Bouteflika aura du mal à obtenir, lui qui prétend à être reconduit sans s'impliquer dans sa propre campagne, ni par le discours et encore moins par l'engagement physique. Le positionnement des partis de l'opposition contre le 5e mandat n'est-il pas en effet en lui-même un refus de reconnaître la légitimité à son prétendant ? Indépendamment de la position des uns et des autres par rapport au processus électoral en cours, les partis de l'opposition, y compris le Mouvement de la société pour la paix du candidat Abderrezak Makri, ont déjà conclu que le maintien de Bouteflika sera un coup de force. Et c'est à juste titre que le candidat Ali Ghediri a déclaré qu'il est contre une révision de la Constitution par Bouteflika. Les partis, à l'instar du RCD, du FFS et même du PT et de Talaie El-Houriat, ne peuvent raisonnablement se précipiter à "la conférence nationale inclusive" de Bouteflika au risque de cautionner un mandat qu'ils auraient dénoncé. On les imagine mal compter parmi les convives de la présidence de la République. Car, la participation à ladite conférence serait reconnaître au pouvoir la volonté et la capacité de réaliser en cinq ans ce qu'il n'a pas pu accomplir durant… 20 ans. Ce serait aider le pouvoir à se sortir sans coup férir de l'impasse dans laquelle il s'est enfoncé, parce qu'ayant produit échec sur échec depuis 1999. En parlant avec assurance de la conférence nationale, Sellal ne fait, en fait, que trahir l'idée véritable que le pouvoir se fait du rendez-vous : ce sera un conclave des partis et organisations alliés. Encore une fois, le pouvoir raisonnera en termes de nombre, une arithmétique dont il a usé jusqu'à ne pas s'apercevoir de son naufrage politique. Le pouvoir a décidé de faire ainsi pour sûr, puisqu'il entend tenir la conférence en question juste après le 18 avril. Visiblement, il entend même s'attarder sur des rounds préliminaires pour tenter de convaincre. S. A. I.