La capitale a vécu hier une nouvelle journée de manifestations estudiantines. Des slogans hostiles au 5e mandat et au système ont été scandés. Les rassemblements ont duré plusieurs heures, entrecoupés d'interventions policières à coups de gaz lacrymogène. Les manifestations contre le cinquième mandat pour le Président candidat, Abdelaziz Bouteflika, et pour le changement démocratique, se suivent et se ressemblent. Etudiants et lycéens sont les plus réguliers. En effet, hier encore, ils étaient des milliers d'étudiants, venus de différents campus de la capitale et des lycées limitrophes, à investir, dès les premières heures de la journée, les rues du centre d'Alger. Le premier rassemblement s'est formé, vers 10 heures, sur l'esplanade de la Grande-Poste. Encerclés par un imposant dispositif de sécurité, les jeunes manifestants, drapés en majorité dans l'emblème national, ont chanté, en chœur, pendant de longues minutes, ce qui est devenu une sorte d'hymne pour les manifestants : "Pas de cinquième mandat, Bouteflika !". Les autres slogans, trouvailles du génie populaire, scandés ou écrits sur des pancartes, visent tous le système et le clan présidentiel. "Système dégage !", "L'Algérie est une République, pas un royaume", "Maintenant que nous sommes éveillés, nous ne laisserons plus rien passer", ou encore le slogan devenu célèbre depuis le début de la contestation : "Le peuple ne veut ni de Bouteflika ni de Saïd". Mais les manifestants n'oublient jamais de rappeler le caractère pacifique de leur action. "Silmia, silmia…(pacifique, pacifique…)". Malgré cela, les éléments des brigades antiémeutes tentent, systématiquement, de les disperser quitte à user, par moment, de gaz lacrymogènes. Tout au long de la journée, au moins un hélicoptère de la police survole les rues d'Alger. Repoussée, vers 14 heures, de la Grande-Poste, la foule occupera, spontanément, le large boulevard menant de la faculté d'Alger vers la Place Audin où un cordon des forces de l'ordre était déjà formé. Le rassemblement, ponctué des mêmes slogans hostiles au pouvoir incarné par Bouteflika, se poursuivra pendant au moins deux heures. La foule n'a pas cessé de grossir. Vers 15 heures, la place Audin est noire de monde. Les éléments de la police ne perdent pas encore leur sang-froid. Ils bloquent les accès mais sans user de violence jusque-là. Mais cela ne durera pas longtemps. Comme lors des précédentes journées, les éléments de la police reçoivent l'ordre de lancer des bombes lacrymogènes. Les manifestants courent dans tous les sens. Les scènes de pagaille durent plusieurs minutes. Pour autant, la détermination des manifestants est loin d'être entamée. Après une "pause-vinaigre", pour se remettre des effets désagréables des gaz lacrymogènes, les étudiants reprendront leur marche en empruntant, cette fois, le Tunnel des Facultés. Les policiers retrouvent aussi leur calme. Mais l'arrivée, vers 16h30, d'un groupe de jeunes, arborant des fanions de leurs clubs de football fétiches, donc visiblement des supporters des clubs algérois, changera le décor. Et les bombes lacrymogènes sortent, une nouvelle fois, des canons des fusils des policiers. La scène dure quelques minutes avant que la foule ne soit définitivement dispersée…dans le calme. Mais, un autre rendez-vous est déjà pris pour aujourd'hui. Car, désormais, le rendez-vous sera quotidien.