Ahmed Gaïd Salah, et donc l'armée, ne tient pas à une transition dans le cadre stricte de la constitution comme on tiendrait à un sacerdoce. En visite de travail dans la wilaya d'Ouargla, le chef d'état-major de l'ANP a mis, dans un discours fort attendu, une nouvelle variante dans la feuille de route qu'il a soutenue jusqu'ici. Gaïd Salah, qui a mis l'accent sur l'urgence de sortir de la crise dans laquelle le pays s'enlise, a laissé le spectre des solutions ouvert. « j'insiste une fois encore sur la nécessité de suivre la voie de la sagesse et de la patience, étant donné que la situation prévalant au début de cette transition est exceptionnelle et complexe, nécessitant la conjugaison des efforts de tous les patriotes dévoués en vue de sortir indemne de cette épreuve» , a-t-il dit, ajoutant que (…) toutes les perspectives possibles sont ouvertes afin de surpasser les difficultés et trouver une solution à la crise dans les meilleurs délais, car la situation ne peut perdurer davantage, vu que le temps nous est compté(… ). Ce spectre ouvert de perspective et l'urgence d'aller vers une solution de sortie de crise signifient-ils un abandon de la transition telle que préconisé et entamée depuis la démission de Bouteflika ? La démission, le jour même, du président du conseil constitutionnel, Tayeb Belaïz, peut le suggérer, mais, il faut peut-être se garder de toute conclusion précipitée. Ceci même s'il y a lieu de noter une évolution notable dans le discours du chef de l'état-major de l'ANP qui, le 30 mars dernier, formulait une solution de sortie de crise qui s'inscrit « exclusivement dans le cadre constitutionnel ».Gaïd Salah élargissait ce jour-là le cadre constitutionnel aux articles 7 et 8 de la constitution qui énoncent la souveraineté du peuple. Après le discours d'aujourd'hui de Gaïd Salah, les choses sont appelées à évoluer rapidement. Que ce soit pour la mise en application d'une éventuelle nouvelle feuille de route ou par rapport au traitement des dossiers de corruption. Corruption : La justice invitée à agir vite Le chef d'état-major de l'ANP est revenu à la charge concernant le dossier de la corruption. (…) « nous attendons à ce que les instances judiciaires concernées accélèrent la cadence du traitement des différents dossiers concernant certaines personnes ayant bénéficié indûment de crédits estimés à des milliards, causant préjudice au trésor public et dilapidant l'argent du peuple ». Il y a dans ce ton employé par Gaïd Salah une incitation à instruire au plus vite les dossiers d'une corruption qu'il affirme existante, puisqu'il parle de dilapidation, de crédits indûment octroyés etc. Des termes qui normalement renvoient à des réalités non pas soupçonnées mais avérées. Mais la justice ouvrira-t-elle vraiment la boite de pandore ou se contentera-t-elle d'instruire certains dossiers et en occulter d'autres ? La question se pose car, pour que la lutte contre la corruption soit impartiale, il faut que la justice jouisse d'une totale indépendance. Ce qui est encore loin d'être le cas. Sofiane Ait Iflis