Paru aux éditions Chihab, Les mouvements amazighs en Afrique du Nord a fait l'objet d'une rencontre, samedi dernier, en présence de Nacer Djabi et Samir Larabi. Dans le cadre de la parution en langue française des Mouvements amazighs en Afrique du Nord (éditions Chihab), une rencontre a eu lieu durant l'après-midi de samedi dernier, à la librairie Chihab internationale, autour de cet ouvrage collectif réalisé sous la direction de Nacer Djabi. Ce "premier" livre du genre "consacré" à l'étude du mouvement amazigh en Afrique du Nord est né d'une convention de recherche entre le CREAD (Centre de recherche en économie appliquée pour le développement) – localisé au CREAD – et le CRDI (Centre de recherche canadien). Dans sa présentation, le sociologue Nacer Djabi a d'emblée expliqué que cette étude a été réalisée en 24 mois, et est le "fruit" d'une équipe de recherche composée de "11 chercheurs de 5 pays. Nous avons choisi des échantillons de 9 régions, à savoir le Rif et le Moyen-Atlas (Maroc), Kabylie, M'zab et Touareg (Algérie), Djebel Nefoussa et les Touareg (Libye), Siwa (Egypte) et Djerba et quelques villages du Sud-Ouest encore amazighophones en Tunisie". À propos des contributeurs, le conférencier a informé l'assistance avoir mis du temps pour constituer l'équipe de recherche et "nous avons décidé de sortir de ce qui a été fait dans le domaine de la recherche auparavant". Selon Djabi, les recherches ayant été faites auparavant ont été "réalisées à l'étranger et se focalisaient sur les thèmes de la langue, de l'histoire, de la femme, et elles étaient dominées par le caractère ethnographique, anthropologique", alors que son équipe n'est pas "spécialisée" dans les questions de la langue. À cet effet, pour se démarquer des Ooccidentaux et pour offrir un travail minutieux, d'autres axes ont été abordés. "On est parti du postulat que ce sont des mouvements sociopolitiques. Ce sont des mouvements sociaux qui revendiquent et on le remarquera. Nous sommes face à une diversité dans les régions qui utilisent la langue amazighe comme une langue du quotidien ; ces régions on ne les sépare pas de ces sociétés", a-t-il indiqué. Tout en précisant : "Nous avons essayé de localiser ces régions. On constate que ce sont des régions isolées ; à la marge géographique (montagne, île, sahara). Après avoir été des langues majoritaires, elles sont devenues des langues minoritaires." Dans cette étude, les chercheurs ont mis en exergue, notamment les supports sociologiques qui diffèrent d'un cas à un autre – géographie et sociologie. "Ces sociologies différentes amènent à des formes d'expressions différentes. On peut citer en exemple la Kabylie où on retrouve des élites différentes et épaisses organisées notamment en partis politiques. Des élites présentes qui ont eu un rôle dans le mouvement national, la guerre de libération, la construction de l'Algérie indépendante. Ce qui est différent de Siwa : région agricole où il n'y a pas beaucoup de personnes éduquées... Les doctrines (madhab) différentes aussi." Lors de son intervention, il a également évoqué la relation entre les mouvements amazighs et l'Etat-nation, en questionnant sur son évolution et comment s'est faite l'intégration dans le tissu national ? Sur cette interrogation, il a soutenu que la Kabylie est très "intégrée". Dans le même sillage, le contributeur Samir Larabi a développé en soulignant avoir essayé de comprendre la genèse, de "l'évolution de la question amazighe en tant que question sociale, du mouvement amazigh depuis les années 1940 jusqu'à aujourd'hui ; ses évolutions, ses ramifications dans le mouvement étudiant, dans le mouvement féminin et syndical...". Sur ces interrogations, il est arrivé à la conclusion que toutes ces "dynamiques" (durant les années 1970-1980) ont porté "le mouvement et nous avons eu aussi le rôle de l'université qui était un centre de débat et de construction politique, notamment celle d'Alger, qui a permis à étendre ce mouvement dans plusieurs wilayas (Oran, Béjaïa, Jijel…), et dans les quartiers populaires, notamment Bab El-Oued". À travers cet ouvrage, les contributeurs ont entre autres tenté de "déconstruire" les préjugés en démontrant que la question amazighe n'est pas "née des structures traditionnelles, elle est née en dehors de ces dernières, ce qui fait que c'est un mouvement social et moderne qui a permis au mouvement de s'étendre de manière extraordinaire". Concernant ces structures traditionnelles, Larabi a soutenu que dans certaines régions elles ont "joué comme élément de frein, ce n'est qu'après octobre 1988 que la chose s'est développée, notamment chez les Mozabites et les Touareg. Aujourd'hui, nous assistons à une nouvelle génération de militants qui revendiquent la généralisation de l'utilisation de la langue amazighe". À propos de cette dernière, il a cité comme exemple la généralisation de son enseignement, la prise en charge réelle et effective avec des outils nouveaux qui échappent au contrôle des structures traditionnelles. Les mouvements amazighs en Afrique du Nord est un ouvrage fort intéressant qui permettra aux lecteurs d'approfondir leurs connaissances sur ce sujet et de "susciter" l'intérêt des chercheurs et spécialistes dans le domaine. H. M.