Le folklore qui s'est installé dans les marches précédentes a cédé la place aux slogans politiques qui ont bien repris leurs droits. Ils se comptaient par milliers même s'ils se rejoignaient tous dans le fond. C'est une rue nettement mieux organisée, et qui a redoublé de génie et surtout de détermination pour répondre aux derniers développements politiques, qui nous a été donné d'observer, hier, à Tizi Ouzou, à l'occasion de ce 10e vendredi consécutif durant lequel la foule a été, faut-il le souligner, encore plus imposante que lors du précédent vendredi. Le ton de ce que pouvait être ce 10e vendredi a été donné bien avant 12h tant, contrairement aux deux vendredis précédents, une foule plus importante s'était déjà rassemblée devant l'entrée du campus Hasnaoua de l'université de Tizi Ouzou. L'emblème national et le drapeau berbère sont brandis par milliers aux côtés des pancartes et banderoles. À 13h, la foule continuait de grossir à vue d'œil, avant de s'ébranler pour se diriger vers le centre-ville en scandant : "Ahya El-Gaïd, Ahya El-Gaïd, ma ranache khayfine !" Un nouveau slogan destiné, bien évidemment, au chef d'état-major de l'armée, Ahmed Gaïd Salah, pour lui signifier que le peuple n'a pas peur de lui après son discours jugé "menaçant" de mardi dernier. La marée humaine devient encore plus impressionnante en entamant la rue longeant le CHU de Tizi Ouzou. Ceux qui misaient sur l'essoufflement de la mobilisation ne devaient, ainsi, récolter que de la déception. Sur ce tronçon, tout comme sur tout l'itinéraire de cette grandiose manifestation, une situation nouvelle n'a pas échappé aux observateurs : la disparition quasi totale des véhicules et des motos qui tentent de circuler sur l'itinéraire de la marche. Fait encore nouveau, la détermination à aller au bout du combat pour le départ du système en entier et l'instauration d'un véritable régime démocratique étaient, encore hier, plus que jamais décelables. Preuve en est, le folklore qui s'est installé dans les marches précédentes a cédé la place aux slogans politiques qui ont bien repris leurs droits. Ils se comptaient par milliers même s'ils se rejoignaient tous dans le fond. "Un pouvoir isolé et sans peuple. Ce peuple ne reconnaît pas ce pouvoir fantoche", "Nous ne voulons rien de votre part, nous voulons juste votre départ", "Celui qui veut lutter contre la corruption doit être propre. Qui juge qui ? Tetnehaw ga3", "La police est partout, la justice est nulle part", lit-on, entre autres, sur ces banderoles et pancartes. Dans certains carrés, on entend scander "Libérez Rebrab, jugez el îssaba", "Libérez Rebrab, jugez Saïd Bouteflika". À 17h, les manifestants commençaient à se disperser dans le calme comme à l'accoutumée.