L'institut Cervantès d'Alger a abrité, avant-hier en fin de journée, une conférence-débat sur l'un des pères de la littérature argentine moderne, Jorge Luis Borges, animée par le spécialiste de l'écrivain et directeur de la revue littéraire Sures, Santiago De Luca. Durant cette rencontre intitulée "Borges, un écrivain arabe dans la langue des Argentins", qui clôturait par ailleurs la première Semaine de la langue espagnole en Algérie, le rapport de Borges à la langue et la littérature arabes a été évoqué par le docteur en philologie et professeur de lettres de l'Université Nacional del Litoral en Argentine. Le premier contact de l'auteur de La bibliothèque de Babel avec la langue d'El-Mutanabbi a été durant son enfance, quand il trouva, dans la bibliothèque de ses parents férus de littérature, une traduction des Mille et une nuits d'Antoine Galland. À ce moment précis, c'est la révélation ; non seulement il y découvre sa fascination pour les mots, mais aussi cet univers particulier des contes venus de l'Orient. Plus tard, ce sont des traductions en anglais, en allemand et en espagnol qui le mèneront à s'inspirer et incorporer cette œuvre du patrimoine universel à son écriture. Les Mille et une nuits font partie de la vie de Borges, dira De Luca. "Il était l'un des meilleurs spécialistes de cette œuvre en Argentine. À plusieurs reprises, il a intégré les Mille et une nuits dans ses contes et sa poésie. Il a travaillé sur plusieurs traductions, il en a pris des métaphores qu'il a utilisées dans ses écrits. Dans d'autres œuvres, il s'en inspire et réécrit des contes des Mille et une nuits à sa manière. Il était le premier écrivain argentin à s'essayer à cette écriture." Parmi les œuvres de Borges directement inspirées des Mille et une nuits, le professeur citera L'histoire de deux hommes qui ont rêvé (Historia De Los Dos Que Soñaron), l'essai Mille et une nuits, écrit à partir d'une conférence donnée à Buenos Aires, en plus du poème intitulé Les métaphores des Mille et une nuits. À son tour, Borges inspirera d'autres auteurs, dont les œuvres deviendront des références littéraires universelles. Le nom de la rose, d'Umberto Eco, a été inspiré par le poème El Golem. Dans cette œuvre, Eco rend hommage à l'écrivain argentin à travers le personnage Jorge De Burgos, un bibliothécaire aveugle. En plus de cette volonté de comprendre l'Orient durant toute sa vie, à travers une bibliographie imprégnée de sa fascination pour le monde arabo-musulman, Borges tentera, dira le conférencier, d'apprendre l'arabe au crépuscule de sa vie. "Quand il était très malade en Suisse, il a voulu apprendre l'arabe. Même s'il n'a pas entièrement appris la langue, Borges dira, au professeur égyptien qui lui dispensait les cours, que son but n'était pas spécialement de l'apprendre, mais de vivre une aventure et une découverte." À noter enfin que les organisateurs de cet évènement, Ana Flor Alburquerque, cosneillère culturelle à l'ambassade d'Espagne en Algérie, et Antonio Gil, directeur de l'Institut Cervantès, diront que "le bilan de cette première édition est très positif, nous avons organisé plusieurs activités, dont des concerts, des conférences. Nous voulons montrer aux Algériens les cultures des vingt et un pays hispanophones". Et de poursuivre : "C'est la première fois qu'on organise cette initiative simultanément au Maghreb, ça a été motivé par une forte présence d'hispanophones au Maroc, en Algérie et en Tunisie. Cette année, on a constaté qu'il y avait un intérêt réel et qu'on pouvait organiser des activités plus complexes autour de la langue espagnole."