Le poète Rabah Bedaouche, auteur du Sentier des plaies, vient d'éditer son second recueil de poésie Un arc en ciel en pleine nuit, chez le même éditeur Tafat. Né à Aokas en 1993, l'auteur est titulaire d'un master 2 communication et relations publiques de l'université de Béjaïa. Et il se dit être "très chanceux d'avoir ouvert ses yeux dans cette ville" qui a comme décor la Méditerranée à perte de vue. D'où sa passion pour la poésie, la littérature, la musique mais aussi la philosophie. Le fait qu'il soit musicien et chanteur, cela l'a assurément beaucoup rapproché de la poésie en écoutant notamment les grands noms de la musique kabyle, à l'instar de Matoub, d'Aït Menguellet ou de Slimane Azem. Les lectures diverses et variées, plus singulièrement celles se rapportant à la philosophie, l'ont amené "à questionner d'autres sujets de la société", comme en témoignent les titres de ses poèmes. Dans Ce que me souffle ma philosophie, il écrit : "Mes mots peuvent être exigeants. Mais justes ! C'est le loup de ma philosophie parlant. Sans crainte !" Dans le même poème, il avoue son amour immodéré pour les vers libres : "J'ai la poésie dans la peau. La musique dans le sang. L'art dans l'âme. La philosophie dans tout mon être." Il poursuit : "Aiguise tes mots. Contre les maux. Accompagne ton sang. Ne t'arrête guère, bon sang !" Dans les Mille et une raisons d'écrire, il récidive en se voulant plus explicite : "La poésie est un témoin engagé. Qui doit tout dire. Du maquillage des mots, elle devient enragée ! Que oui ! La poésie doit siffler l'erreur." Dans Résurrection, les premiers vers ne laissent pas indifférents : "Nous, les vivants-morts ! Nous parlons souvent, des morts-vivants ! Mais qui sont les vivants ? Qui sont les morts ?" D'autres vers viennent en réplique dans un autre poème, l'Exil immobile. "Ô jeunesse ! Rêve chez toi", un vers qui est à lui tout un seul un programme, une invite à une jeunesse assoiffée de liberté. Cette poésie, écrite avant le début de la révolution du 22 février, Rabah Bedaouche avait donné une clé pour sa réussite : "Le partage est la meilleure philosophie. Il peint le portrait de la joie. Vivre le temps en cours est l'oubli de la maladie. À la vie, c'est ton plein droit." Après avoir rappelé d'où il vient, le poète engagé écrit dans Sur les hauteurs de la Kabylie des vers sortis du plus profond de soi : "Je viens des hautes montagnes. N'en déplaise à «certains» ! La peau frappée par ce soleil digne. Où l'honneur occupe terrain (…) Regarde ! Nos grands-mères. Le dos courbé comme un dôme. Le front est de mille rides, qui sont cette misère. Observes-tu la sensibilité de l'âme." Enfin, dans El-Djazaïri (l'Algérien), Rabah Bedaouche a écrit des vers qui se viennent en écho au mouvement révolutionnaire en cours : "Oui ! Je veux vivre, je suis fatigué de mourir ! Fatigué de cet «espoir» sans fin. Maintenant, il est grand temps de vomie ? Cette attente, enfin. Mon jeune âge, vous livre son discours. Cet instant, est le beau paradis que je possède. Quitte à terminer ma vieillesse en enfer ! Le verre de la patience est complètement vide !" Ces vers sont franchement prémonitoires. Le jeune poète de 26 ans a fait énormément de progrès dans son nouveau recueil de poésie. Mais Rabah Bedaouche gagnerait à faire du dictionnaire des combinaisons de mots son livre de chevet pour trouver le bon synonyme en contexte. C'est à force de forger que l'on devient forgeron. M. OUYOUGOUTE