Les deux films des réalisateurs marocain et tunisien ont laissé une bonne impression et confirment l'espoir d'un renouveau du 7e art nord-africain. Cannes. Le temps s'est refroidi légèrement, le soleil se fait timide pour laisser place à un ciel capricieux jouant avec les nuages. Et cela fait le bonheur des organisateurs, puisque les salles de cinéma ne désemplissent pas. Les deux films des réalisateurs issus des pays d'Afrique du Nord ont laissé une bonne impression et confirment l'espoir du renouveau du 7e art nord-africain. Jusque-là, deux films ont été montrés. Les deux ont ouvert les compétitions dans leurs sections respectives, tout en laissant une bonne impression auprès des festivaliers. Il s'agit du marocain Le Miracle du saint inconnu, de Alaa Eddine Aljem, en lice dans la "Semaine de la critique" et du Tuniso-Canadien La femme de mon frère de Monia Chokri qui concourt dans la section "Un certain regard". Le premier surprend d'emblée par l'originalité et le caractère insolite de son histoire. Quelque part dans le désert marocain. Un voleur enterre une sacoche remplie d'argent sur une colline avant de se faire prendre par la police. Dix ans plus tard, il y revient récupérer son butin. Mais il trouve qu'un mausolée y a été érigé. Les tentatives de récupération sont à l'origine d'aventures aussi drôles que cocasses. Avec ce premier long métrage, Alaa Eddine Aljem signe un film fort qui opère une rupture avec les habitudes du cinéma marocain en privilégiant la narration iconique, des dialogues rares, concis et denses, et en utilisant des décors naturels saisissants. En empruntant la voie de la fable pour parler du Maroc avec ses problèmes divers, notamment ceux des populations isolées, en explorant les paradoxes de l'imaginaire et en insufflant quelques accents de spiritualité, le réalisateur renoue avec une tradition orale que la littérature a abondamment exploitée, comme dans Moha le fou, Moha le sage de l'écrivain Tahar Benjelloun. Ceci étant dit, même si la concurrence est rude dans cette section, le film se positionne bien. Le second a été présenté dans la section "Un certain regard". Ce premier long métrage de la Québécoise d'origine tunisienne Monia Chokri suit son brillant court métrage Quelqu'un d'extraordinaire. Elle est aussi connue comme actrice révélée dans Les Amours imaginaires (2010) de Xavier Dolan. "Je suis née l'an passé dans la même section comme actrice, et j'espère naître aussi cette année comme réalisatrice", a-t-elle déclaré avant le lancement de son film qui se résume comme suit : "Montréal. Sophia, jeune et brillante diplômée sans emploi, vit chez son frère Karim. Leur relation fusionnelle est mise à l'épreuve lorsque Karim, séducteur invétéré, tombe éperdument amoureux d'Eloïse, la gynécologue de Sophia…" À travers ce film, la réalisatrice s'attarde sur la relation entre une sœur et un frère qui est chamboulée par la nouvelle relation amoureuse de ce dernier. Le film livre une analyse psychologique d'une trentenaire célibataire égotique dans sa relation avec son frère, sa famille et son entourage. La réalisatrice a aussi ponctué avec bonheur son film par des réflexions philosophiques et humoristique tout en cherchant à s'inscrire dans l'universalité prenant en charge les problèmes du monde. La complexité du début a laissé place à un hommage émouvant à la famille, aux amis, à ceux qui souffrent dans le monde et la gratitude envers les cadeaux de la vie. Dans cette section aussi la concurrence est rude. Mais le film conserve ses chances. La météo annonce le repli du soleil lors des prochains jours. Voilà ce qui n'arrange pas les affaires des commerçants et qui augmentera le remplissage des salles.