Absence de candidats, refus populaire et impréparation de l'administration ; l'élection présidentielle prévue le 4 juillet prochain est plus que jamais compromise. À quelques heures de la clôture des délais légaux pour le dépôt des candidatures pour ce scrutin, les choses semblent se compliquer pour le pouvoir. Alors que les délais réglementaires expirent ce soir, un seul candidat semble avoir réuni les parrainages nécessaires pour se porter candidat à une élection présidentielle. Abdelaziz Belaïd, président du Front El-Moustaqbal (Front de l'avenir) dispose de suffisamment d'élus pour se passer des 60 000 parrainages populaires nécessaires (600 élus suffisent en effet à valider une candidature). Mais sur les 75 autres citoyens qui ont retiré les formulaires de souscription à la présidentielle, aucun postulant n'a fait ne serait-ce que l'effort de collecter quelques parrainages. Il est donc impossible de tenir une élection présidentielle avec un seul et unique candidat. Un premier échec donc pour un pouvoir qui veut, coûte que coûte, opérer un véritable coup de force en allant vers une élection présidentielle dont personne ne veut. Face à cette évidence, les autorités semblent résignées. Tout en multipliant les communiqués pour faire croire que l'opération se déroule normalement, elles savent que le pari est impossible. "L'élection n'aura pas lieu", a ainsi tranché un responsable, qui a requis l'anonymat, à l'agence britannique Reuters. La même source ajoute que le scrutin présidentiel "sera reporté". Comment ? Pour quand ? Aucune réponse n'est donnée. Si l'élection ne se tient pas dans les délais constitutionnels comme le souhaitent les tenants du pouvoir, c'est tout l'édifice actuel qui s'écroulera. Surtout qu'après le 9 juillet, la présence d'Abdelkader Bensalah à la tête de l'Etat ne sera plus justifiée. Ce sera la voie ouverte à une transition forcée. Sur le plan purement légal, le pouvoir n'aura donc plus de légitimité constitutionnelle. Il sera dans l'obligation de trouver une solution pour une sortie de crise. Pis encore, au fur et à mesure que l'on s'approche de l'échéance du mois de juillet, le pays s'enfonce dans une dangereuse impasse. Le pouvoir, dans toutes ses composantes, perdra ainsi le peu de crédibilité dont il se vante depuis la chute d'Abdelaziz Bouteflika le 2 avril dernier. Il confirme ainsi qu'il ne peut être l'origine de la solution d'une crise dont il est le premier responsable. Désormais, la voie est grande ouverte vers une transition politique. L'option, qui fait largement consensus au sein de la classe politique de l'opposition et même des manifestants, s'imposera de fait. À moins d'un autre scénario plus machiavélique que les autorités prépareraient en coulisses, il est difficile d'imaginer une autre solution à l'heure actuelle. Le pays a déjà perdu trois mois avec l'entêtement du pouvoir à n'accepter aucune autre solution en dehors de l'application de l'article 102 de la Constitution. Et c'est cette obstination qui risque de mener le pays au chaos et non le contraire.