La mobilisation est restée intacte, dans la capitale du hirak, Bordj Bou-Arréridj, en ce 15e vendredi de contestation où les slogans habituels de rejet du système ont été scandés. Bordj Bou-Arréridj a vécu, néanmoins, une journée quelque peu tendue au niveau des entrées de la ville et à "Qasr Echaâb" (palais du peuple), haut lieu du hirak. Des forces de l'ordre s'y sont postées, très tôt le matin, interdisant l'accès à la ville et à la bâtisse. Il faut dire que la mobilisation n'a pas faibli par rapport à vendredi dernier. Selon des témoignages, il y avait même plus de manifestants hier, quatrième vendredi du mois de Ramadhan. Les principaux slogans ont porté sur le rejet de la présidentielle du 4 juillet prochain, le refus du dialogue avec "la bande" et l'instauration d'un Etat civil. "L'Algérie ne sera jamais une caserne. Elle sera sociale et démocratique", pouvait-on lire sur des pancartes. Les manifestants ont réitéré leur appel pour "le départ de tout le système" et pour une transition, qui ne soit pas conduite par les responsables à l'origine de cette situation. Mais, pour la nouveauté de ce vendredi, les manifestants ont crié leur colère contre la restriction des libertés. "Manifester pacifiquement est un droit constitutionnel", ont-ils scandé. "Le droit de circuler est aussi fondamental", criaient-ils. Les marcheurs ont donné une réponse claire et nette à l'offre de dialogue renouvelée par le chef d'état-major de l'armée. "Sur le principe, je suis pour le dialogue. Cependant, la peur du dialogue a pour origine le flou qui l'entoure. Serait-ce un dialogue bilatéral entre, d'une part, les partis politiques, les syndicats et les associations et, d'autre part, le pouvoir ? Ou bien un dialogue collectif, et là ça va être une conférence ? S'il s'agit d'une conférence, il va falloir défricher le terrain en faisant connaître les objectifs de cette conférence et les moyens à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs tracés", disent les manifestants dans leurs débats publics, devant le "Palais du peuple". "Qui va mener le dialogue ? Avec qui va-t-on dialoguer ?...", se demandent les manifestants qui exigent des discours clairs sans ambiguïté. "Le discours politique doit être clair et précis", ajoutent-ils en rappelant le slogan "Makanch hiwar avec îssabet" (Pas de dialogue avec la bande). L'ombre de Kamal-Eddine Fekhar a plané tout au long de la manifestation et jusqu'à 15h, heure de la minute de silence. "On ne doit plus mourir pour ses idées et ses positions politiques en Algérie", scandaient les manifestants. Par ailleurs, des manifestants ont appelé à la libération d'Issad Rebrab, du président de Cevital, du général Benhadid et de Hadj Gharmoul, le manifestant arrêté avant le début du hirak. Au milieu des manifestants, il y avait les emblèmes, algérien et de thamazgha, côte à côte, en guise de réponse à ceux qui tentent désespérément de briser l'unité nationale en essayant de choisir la Kabylie comme cible et d'affaiblir ainsi le mouvement. "Courage et résistance", écrira ce manifestant sur une pancarte, comme pour signifier que la lutte pacifique peut prendre du temps. Cette semaine, pour clôturer la marche, le tifo revient pour résumer une semaine de revendications et d'actions. À M'sila, malgré la chaleur et le jeûne, les manifestants ont été très nombreux à sortir dans la rue pour dire "Oui au dialogue mais pas avec el îssaba". À Boussaâda, les citoyens sont sortis pour réclamer le départ de tout le pouvoir. Chabane BOUARISSA