Ambiance à la fois solennelle et festive, hier, place de la République, à Paris, où se sont rassemblés nos compatriotes de la région parisienne pour la 17e fois consécutive depuis le 17 février dernier, date de la première manifestation de la diaspora algérienne en France pour le changement politique en Algérie. Une foule nombreuse s'est massée au pied de la statue qui surplombe la place pour écouter les interventions de manifestants anonymes qui se sont emparés du micro afin d'exprimer leurs revendications et leurs attentes. "L'Algérie doit être rendue aux Algériens. Ce n'est ni la propriété des Emirats arabes unis, ni de la France et encore moins de l'Arabie saoudite", a exigé un compatriote qui a conclu sa prise de parole, en scandant : "L'Algérie libre et démocratique !" Un autre a demandé la libération de tous les détenus d'opinion, expliquant que le régime joue la carte de la répression et du pourrissement pour briser le mouvement populaire. "Le pouvoir n'arrive pas encore à comprendre que ses vieilles méthodes ne sont plus rentables. Le peuple est plus fort et il le prouve chaque semaine en déferlant dans les rues de toutes les villes d'Algérie", a commenté l'orateur. En France, la mobilisation des Algériens est tout aussi époustouflante. Samedi dernier, beaucoup d'expatriés se sont donné rendez-vous devant le consulat d'Algérie à Lyon pour demander le départ du système. Dans un communiqué, le collectif Libérons l'Algérie (qui rassemble une quinzaine d'organisations de l'émigration) a exhorté la diaspora à ne pas baisser la garde et à continuer "à participer activement au soulèvement citoyen" en Algérie. "Nous refusons que ceux-là mêmes qui ont conduit le pays à sa perte lui confisquent sa souveraineté", a souligné le collectif, qui s'est attaqué à l'état-major de l'armée. "Gaïd Salah joue avec le destin de l'Algérie, en donnant l'illusion que l'Etat fonctionne le plus normalement du monde. Il n'y a pas d'institutions, mais des marionnettes", s'est emporté un vieux monsieur qui a également pris le micro. Excédé, il s'en est pris aux membres du gouvernement Bedoui dont il conteste la légitimité. "Il faut arrêter les salaires de ces minables car ce ne sont pas des ministres, mais des minables", s'est-il élevé. Quelques pointes d'humour ont marqué certaines interventions. Un manifestant a fait mine de scruter le ciel à la recherche des mouches électroniques qui pullulent sur les réseaux sociaux. "Pas de place à République pour les casseurs de la voix du peuple", a prévenu, pour sa part, le collectif Libérons l'Algérie dans un post sur Facebook. Le collectif a réservé, en revanche, un accueil chaleureux à Edwy Plenel. Le directeur du journal en ligne Mediapart a pris à son tour la parole pour informer les manifestants de l'organisation, le 17 juin prochain, d'une soirée de solidarité avec l'Algérie, en présence d'acteurs du mouvement populaire. Il a également saisi l'occasion pour saluer le courage des Algériens. "Le peuple algérien a montré tout au long de son histoire une très grande force et une très grande patience, une très grande vitalité et une très grande résistance. Nous n'avons évidemment aucune leçon, aucune recommandation à vous donner. Nous sommes simplement admiratifs, solidaires et fraternels", a fait savoir le responsable de Mediapart, qui a conclu avec une très belle prose : "L'Algérie est un été invincible au creux de tous les hivers et qui résistera à toutes les froidures et à toutes les haines."