La multiplication des cas d'emprisonnement de pharmaciens accusés d'"implication dans la vente illégale de psychotropes" n'a pas laissé indifférent leur syndicat (Snapo), qui a organisé, hier, à Tizi Ouzou, une journée d'information au cours de laquelle il a été démontré qu'à l'origine de ces accusations, il n'y a point de manquement aux règles de déontologie, mais plutôt un vide juridique quant à la gestion et à la dispensation de ces produits. "Le pharmacien d'officine n'est qu'un bouc émissaire dans la situation actuelle où plusieurs aspects de la gestion et de la dispensation des psychotropes ne sont régis par aucune loi claire. Les pharmaciens sont, malheureusement, victimes de ce vide juridique puisque plusieurs d'entre eux sont déjà condamnés à de lourdes peines. Il n'est plus question de continuer d'accepter cette situation", a expliqué le président national du Snapo, M. Belambri, soulignant qu'un nouveau texte réglementaire de nature à combler ces vides juridiques que présente la loi 04-18 du 25 décembre 2004 est déjà finalisé et que les pharmaciens ne demandent que sa mise en vigueur au plus vite pour mettre fin à ce dossier sensible qui préoccupe au plus haut point les pharmaciens, qui se retrouvent, a-t-il déploré, "pris en otage par les délinquants et la loi 04-18, en d'autres termes l'assassinat et la prison". Plus concrètement, le vice-président du syndicat, Karim Merghmi, a expliqué qu'un arrêté répertoriant les psychotropes a été promulgué le 9 juillet 2015, mais les quatre tableaux de classification de ces substances n'ont pas été publiés au Journal officiel. Ce qui n'est pas sans induire des confusions. "Il y a aussi le problème causé par l'article 16 alinéa 2 de cette loi qui pénalise les pharmaciens quant aux ordonnances de complaisance dont ils ne sont nullement responsables. Une ordonnance de complaisance engage plutôt le médecin qui l'a délivrée et non le pharmacien", a ajouté M. Merghmi, avant d'évoquer le crucial problème de l'inexistence de registres de traçabilité à tous les niveaux du circuit qu'empruntent les psychotropes. "Des vides juridiques sont constatés en matière d'importation, de production, de distribution et même de destruction des produits périmés", a-t-il encore relevé, précisant que "même le registre que tiennent actuellement les pharmaciens de leur propre initiative ne s'appuie sur aucun texte juridique". Pis encore, a-t-il poursuivi, dans les affaires de vente de ces médicaments, les juges et la Police judiciaire se réfèrent toujours à la loi 76-140 du 23 octobre 1976, alors que celle-ci a été abrogée. "Il serait temps de mettre fin à cette situation en publiant la liste des psychotropes, en imposant l'ordonnance à trois souches avec numéro de série, le registre du médecin prescripteur, d'importation et de distribution, en uniformisant le registre et la tenue d'un fichier numérique central pour ainsi baliser la gestion technique de ces produits", a-t-il énuméré, insistant sur le fait qu'en attendant la publication des nouveaux textes, les pharmaciens sont en plein désarroi.