Hier, malgré la chaleur caniculaire, les Bordjiens et plus particulièrement les M'silis sont sortis plus nombreux, après avoir déjoué les manœuvres qui ont vainement tenté de diviser leur mouvement. Ce 19e acte du soulèvement citoyen a été une réponse à tous ceux qui ont tenté de briser l'élan révolutionnaire né le 22 février. En lançant, d'une manière inattendue, une bataille autour des drapeaux portés par les manifestants et aussi en appelant à une élection présidentielle, Ahmed Gaïd Salah a créé un contexte très particulier pour ce 19e vendredi. Il en a de fait fixé l'ordre du jour, aussi bien pour les services de sécurité, chargés encore une fois d'appliquer une décision inapplicable, que pour un mouvement populaire qui se retrouvait dans la situation de s'y opposer. Les manifestants ont démontré, encore une fois, que les arrestations pour port du drapeau amazigh et l'incarcération des manifestants ne leur font pas peur. À Bordj Bou-Arréridj, malgré les barrages filtrants et les fouilles aux entrées de la ville, des milliers de manifestants sont sortis crier leur colère et réclamer le départ du système. "Nous avons demandé le départ des B et de tout le système et non pas la suppression des drapeaux", crient les manifestants, qui réclament aussi la libération des détenus politiques. Dans leurs slogans, ils ont dénoncé "le recul" des magistrats sur leur engagement à rester aux côtés du peuple. Les forces de sécurité ont bien essayé d'empêcher la présence du drapeau amazigh, mais c'était bien là une mission impossible.Leur situation inconfortable qui leur attire les quolibets des manifestants, illustre parfaitement le décalage qui existe entre ce qui reste du régime et la population. "Les Algériens s'approprient leur histoire . Les pancartes de ce vendredi 28 juin portent des messages plus clairs et durs envers le pouvoir et dénoncent ses manœuvres", a déclaré une femme en tenue berbère. À M'sila, en dépit des circonstances difficiles, notamment la canicule et le nombre impressionnant des policiers, les M'silis résistent et s'imposent dans la rue. Les manifestants, drapés dans l'emblème national, scandent des slogans hostiles au système en place ainsi qu'à ses symboles et demandent l'application des articles 7 et 8 de la Constitution. C'est d'autant plus vrai que l'emblème national n'a jamais été porté avec autant de ferveur sur les corps et dans les cœurs des Algériens depuis l'indépendance.